03.06.08 - BELGIQUE/RWANDA - LA JUSTICE S'INTERESSE ENCORE A BAGAMBIKI, ACQUITTE PAR LE TPIR

Bruxelles, 3 juin 2008 (FH) - La justice belge continue d'enquêter sur Emmanuel Bagambiki, ancien préfet de Cyangugu en 1994, acquitté par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) et contre lequel le Rwanda a lancé un mandat d'arrêt international, a appris l'agence Hirondelle auprès du parquet fédéral. « Il y a un dossier ouvert, au sens où c'est le parquet fédéral qui s'occupe des questions d'extradition et qu'il y a un mandat d'arrêt qui a été lancé.

2 min 13Temps de lecture approximatif

Mais il n'y aura pas d'extradition parce que la Belgique et le Rwanda n'ont pas signé de tels accords », a déclaré la porte-parole du parquet, qui a ajouté : « Néanmoins, il y a une véritable investigation. »

Suite à son acquittement définitif par le TPIR, le 8 février 2006, de crimes de génocide et crimes contre l'humanité, Kigali avait décidé de poursuivre l'ancien préfet pour viols, des faits pour lesquels il n'a pas été jugé par le tribunal de l'Onu. Le 10 octobre 2007, le tribunal de grande instance de Rusizi, sa région natale, condamnait par contumace Bagambiki, qui vit désormais en Belgique, à la prison à vie pour viols et incitation au viol.

«Il y a une véritable investigation sur ce dossier, ce n'est pas que de pure forme, précise Lieve Pellens, porte-parole du parquet. Bien que la nomination d'un juge d'instruction ne soit pas à l'ordre du jour. » Pour l'heure, il s'agirait de vérifier sa situation en Belgique et d'enquêter sur place sur sa condamnation par la justice rwandaise. Enquête qui aurait été l'un des motifs d'un déplacement au Rwanda, il y a quelques semaines, du procureur fédéral Philippe Meire, a-t-on appris de source judiciaire.

Si l'extradition est écartée, la Belgique pourrait en effet, si l'enquête faisait apparaître assez d'éléments probants, décider de poursuivre elle-même Emmanuel Bagambiki. S'agissant de faits pour lesquels il n'a pas été jugé, cette décision ne contreviendrait pas au principe de droit « non bis in idem » selon lequel nul ne peut être poursuivi ou condamné en raison de faits pour lesquels il a déjà été acquitté ou condamné. Ce qu'a confirmé à Hirondelle une source ministérielle proche de ces dossiers : « C'est théoriquement envisageable, et, dans ce cas, la Belgique pourrait répondre positivement à une demande du Rwanda en ce sens. »

L’avocat de Bagambiki, Me Vincent Lurquin interrogé à Arusha où il défend un autre accusé devant le TPIR a affirmé mardi après midi que son client n’avait jamais été informé de ces éventuelles poursuites. Le Rwanda, a-t-il rappelé, n’a jamais communiqué la moindre information sur ce jugement par contumace bien qu’il ait été sollicité à plusieurs reprises. Il a en outre souligné que si son client n’avait pas été jugé pour viol, c’est parce qu’il n’avait pas été poursuivi par le bureau du procureur au TPIR. Son acquittement est « un vrai acquittement » a-t-il affirmé rappelant que les juges à l’unanimité avaient reconnu son innocence des faits qui lui étaient reprochés.

Aprés de longues démarches notamment auprés du conseil d'Etat la plius hautejuridiction du pays, Bagambiki avait obtenu au mois de juillet 2007, de pouvoir rejoindre en Belgique sa femme et ses enfants au titre du regroupement familial. Il y vit depuis. Kigali, qui avait entretemps lancé un mandat d'arrêt international contre lui, avait alors reproché à la Belgique de l'avoir aidé à rentrer sur son territoire.

BF/PB/GF