20.06.08 - BURUNDI/JUSTICE - L’EVOLUTION DE L'AFFAIRE DE MUYINGA EST INACCEPTABLE (ALISON DESFORGES)

Bujumbura, 20 juin 2008 (FH) – Le refus de la cour militaire du Burundi de juger le massacre de Muyinga en 2006, au cours duquel une trentaine de personnes accusées d'appartenir à l'opposition ont été assassinées, est "inacceptable" a affirmé Allison Desforges, responsable pour l’Afrique de l’organisation Human Rights Watch interrogée au télephone par l'agence Hirondelle AD : C’est une situation très très triste, explique l'infatigable defenseur des droits de l'homme, parce que les autorités n’ont pas pris leur responsabilité alors que c’était facile. On connaît les détails de ce massacre, il y a des militaires et des civils qui sont impliqués, mais ils ne sont pas tous mis en accusation.

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La première enquête judiciare l’a démontré deux semaines après le crime, ça fait déjà deux ans que le massacre a eu lieu. Rien n’a été fait, c’est inacceptable. Si la Cour Militaire s’est déclarée incompétente, il faut nécessairement que les juges civils prennent leur responsabilité pour juger les prévenus".

FH : On parle de manœuvres dilatoires, d'étoufffement du dossier , qu’en pensez vous ?

AD : En effet, on peut comprendre l’interprétation qu’en fait l’opinion. Il y a eu plusieurs rapports, il y a eu plusieurs enquêtes et jusque là rien n’a été fait de façon claire et sincère. Alors, c’est normal que les familles des victimes, les amis, …croient qu’il y a manque de volonté du côté des autorités pour qu’il y ait justice, c’est quand même un crime terrible perpétré au début du pouvoir actuel à Bujumbura.

FH : L’APRODH (Association pour la Protection des Droits Humains) et les familles des victimes voudraient que ce dossier soit confié à la Cour pénale internationale (CPI). Est-ce votre point de vue, la justice burundaise se montre-t-elle incapable de juger ?

AD : On peut comprendre pourquoi on souhaiterait faire appel à des autorités judiciaires internationales. Mais étant donné qu’on a vu que la justice internationale marche très lentement, j’espère que les victimes pourraient avoir de résultats concrets le plus vite en essayant de privilégier une action locale. Si ce n’est pas fait, je crois que les tueries tombent bien dans le mandat de la CPI. Je trouve que cette Cour doit examiner nécessairement le cas et voir la possibilité de se saisir du dossier.

FH : La partie civile demande la réouverture de nouvelles enquêtes pour mettre en accusation d’autres personnes, notamment des civils ayant participé à ce massacre.

AD : Bien sur, si la partie civile n’est pas satisfaite de ce travail judiciaire, il faut corriger les irrégularités. Mais le seul problème, c’est qu’une autre enquête va encore une fois prolonger l’activité judiciaire, et là on va être bloqué et on ne pourra plus entreprendre une autre action. C’est une décision difficile à prendre.

EM/PB/GF