Frappe de la coalition au Yémen: la Croix-Rouge évoque un bilan supérieur à 100 morts

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Une frappe de la coalition emmenée par l'Arabie saoudite sur un centre de détention tenu par les rebelles Houthis a fait plus de 100 morts au Yémen, a estimé dimanche la Croix-Rouge internationale, affirmant s'efforcer de fournir une "aide médicale urgente" aux victimes.

La coalition intervient au Yémen depuis 2015 pour soutenir les forces progouvernementales contre les rebelles qui se sont emparés de vastes zones de l'ouest et du nord du Yémen dont la capitale Sanaa.

Dimanche, elle a annoncé avoir mené des raids aériens contre une "position militaire où sont stockés des drones et des missiles" dans la ville de Dhamar (ouest), selon un communiqué relayé par la chaîne de télévision saoudienne Al-Ekhbariya.

Franz Rauchenstein, à la tête de la délégation du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) au Yémen, a indiqué à l'AFP depuis Dhamar que "plus de 100 personnes avaient été tuées" dans cette frappe.

Selon le Haut commissariat des Nations unies pour les droits de l'Homme, 52 prisonniers ont été tués dans la frappe, 68 sont portés disparus et le bilan risque de s'alourdir.

Des équipes médicales du CICR se sont rapidement rendues avec des sacs mortuaires sur le lieu visé, que l'organisation avait visité dans le passé, "un bâtiment universitaire qui a été vidé et est utilisé comme centre de détention", a indiqué M. Rauchenstein.

"Frapper un tel bâtiment est choquant et triste, les prisonniers sont protégés par le droit international", a rappelé M. Rauchenstein. Au moins 40 blessés ont été hospitalisés dans des hôpitaux de Dhamar, selon lui.

"A l'heure à laquelle nous parlons, les équipes (du CIRC) sont en train de travailler sans relâche pour trouver des survivants sous les décombres", a-t-il ajouté, estimant que les chances de survie étaient "très faibles".

Des images obtenues par l'AFP montrent un bâtiment considérablement endommagé et plusieurs corps gisant sous les décombres, tandis que des bulldozers déblayent les débris.

- Crimes de guerre -

Affirmant avoir pris toutes "les mesures de précaution nécessaires pour protéger les civils", la coalition a assuré avoir visé dimanche "une cible militaire légitime".

Selon la coalition, des explosions ayant eu lieu après la frappe montrent que le bâtiment ciblé servait à stocker des armes et que les Houthis mentaient en "disant qu'il s'agit d'une prison secrète".

Les Houthis ont eux assuré sur leur chaîne de télévision Al-Massirah que "des dizaines de personnes avaient été tuées ou blessées" dans sept frappes sur un bâtiment servant de prison.

"L'ennemi a délibérément visé des prisonniers à Dhamar, dont beaucoup s'apprêtaient à être libérés dans le cadre d'un échange de prisonniers", a déclaré le chef des rebelles, Abdelmalek al-Houthi, dans un discours télévisé.

L'émissaire de l'ONU au Yémen, Martin Griffiths, a dit "espérer que la coalition lance une enquête", ajoutant dans un communiqué que "la tragédie d'aujourd'hui nous rappelle que le Yémen ne peut pas attendre".

Depuis 2014, le conflit au Yémen a fait des dizaines de milliers de morts dont de nombreux civils d'après des ONG. Il a plongé ce pays --le plus pauvre de la péninsule arabique-- dans la pire crise humanitaire au monde selon l'ONU.

Les Houthis comme l'Arabie saoudite et ses alliés sont accusés de violations qui pourraient être considérées comme des crimes de guerre. L'ONU avait placé en 2017 la coalition sur sa liste noire des pays et entités commettant lors de conflits des exactions contre des enfants.

- Nouveau front -

Ces frappes interviennent alors qu'un nouveau front s'est ouvert dans la guerre au Yémen.

La coalition est ébranlée depuis plusieurs semaines par des combats internes dans le sud entre séparatistes sudistes yéménites, soutenus par les Emirats arabes unis, et forces progouvernementales, soutenues par Ryad.

Début août, les séparatistes ont pris le contrôle de la ville d'Aden, devenue la "capitale provisoire" du gouvernement après la prise de Sanaa par les Houthis. Le gouvernement a accusé les Emirats arabes unis d'avoir soutenu un "coup d'Etat".

Selon des analystes, ces affrontements dans le sud sont un test pour Ryad, qui espère un cessez-le-feu, pour pouvoir se concentrer sur la guerre contre les rebelles, soutenus par son rival iranien.