11.02.2004 - TPIR/BUTARE - UN ANCIEN PREFET AURAIT ORDONNE "D'ECRASER" LES ENFANTS TUTSIS

Arusha 11 février 2004 (FH)- Un ancien préfet de Butare (sud du Rwanda), Alphonse Nteziryayo, accusé de génocide et de crimes contre l'humanité devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) aurait ordonné " D'écraser" les enfants tutsis pour mieux s'assurer de l'extermination de ce groupe ethnique, selon un témoin entendu mercredi. Dénommé "TP" pour préserver son anonymat, le témoin est une femme tutsie rescapée des massacres commis à Butare en 1994.

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"Quand vous tuez un serpent, vous devez aussi creuser le trou, retrouver les oeufs et les écraser ", aurait lancé l'ancien préfet lors D'une réunion tenue au mois de juin 1994 , a rapporté Mme TP.

Le témoin a indiqué que Nteziryayo, qui se référait aux enfants tutsis, se trouvait à ce moment-là au bureau communal de Muganza, en présence notamment de l'ex-maire Elie Ndayambaje, également accusé avec lui.

Mme TP est le trentième témoin à charge dans ce procès dans lequel Nteziryayo et Ndayambaje comparaissent aux côtés de quatre autres ressortissants de la province de Butare. Les autres accusés sont l'ancienne ministre de la famille et de la promotion féminine, Pauline Nyiramasuhuko, son fils Arsène Shalom Ntahobali, un autre ancien préfet de Butare, Sylvain Nsabimana, ainsi que l'ancien maire de Ngoma, Joseph Kanyabashi.

Nteziryayo appelait à tuer tous les enfants tutsis de Muganza qui avaient pu échapper aux attaques menées par des Hutus, des Twas, des réfugiés burundais et des soldats de la garde présidentielle, a allégué le témoin.

Interrogée par la représentante du procureur, Adelaide Whest, Mme TP a expliqué qu'après avoir entendu le discours de Nteziryayo, elle a pris la fuite, craignant pour sa vie et celle du bébé qu'elle portait au dos.

Des assaillants ont par la suite fait irruption à son domicile après la réunion et lui ont donné l'ordre de leur livrer le bébé. "N'as-tu pas entendu ce que Nteziryayo a dit ? ", lui
auraient demandé les assaillants. Elle a rapporté qu'ils ont enlevé son bébé et trois enfants de son beau-frère qui avait péri lors D'une attaque antérieure.

"J'ai vu, de mes propres yeux, le corps de mon enfant et J'ai supplié des gens pour qu'ils m'aident à l'enterrer », a t- elle répondu, en kinyarwanda, à Adelaide Whest, qui lui demandait si elle avait revu son bébé.

Le témoin avait auparavant accusé Ndayambaje D'avoir dirigé un convoi de cinq véhicules qui transportaient des assaillants en direction de la colline de Kabuye où de nombreux Tutsis avaient cherché refuge.

A la fin de l'interrogatoire principal, Mme TP a provisoirement quitté le prétoire pour permettre au témoin précédent, TW, de poursuivre sa déposition. Ce dernier n'avait pas été en mesure de se présenter mercredi matin pour des raisons de santé.

Le procès du groupe Butare se déroule devant la deuxième chambre de première instance du TPIR présidée par le juge tanzanien William Hussein Sekule, assisté des juges malgache Arlette Ramaroson et ougandaise Solomy Balungi Bossa. Les débats se poursuivent jeudi.

ER/NI/AT/FH (BT''0211A)