01.04.2003 - TPIR/MEDIAS - NGEZE NIE AVOIR APPELE LES HUTUS A S'UNIR CONTRE LES TUTSIS

Arusha, le 1er avril 2003 (FH) - l'ancien directeur et rédacteur en chef de la revue Kangura, Hassan Ngeze, un des trois accusés dans le procès des "médias de la haine", a nié avoir appelé les Hutus à s'unir contre les Tutsis, à la fin de son témoignage direct mardi devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). Hassan Ngeze dépose depuis lundi de la semaine dernière pour sa propre défense.

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Mardi après-midi, il a commencé à répondre aux questions du procureur.

Hassan Ngeze est poursuivi notamment pour incitation directe et publique à commettre le génocide anti-tutsi et les massacres D'opposants qui ont fait un million de morts, au Rwanda, entre avril et juin 1994. Il plaide non coupable.

"Je n'ai pas demandé aux Hutus de s'unir contre les Tutsis. J'ai demandé aux Hutus de s'unir entre eux", a déclaré Hassan Ngeze. Selon lui, il y avait des dissensions profondes entre Hutus du nord et Hutus du sud qu'il fallait D'abord dissiper avant de s'attaquer au conflit hutu-tutsi qui, a-t-il dit, a émaillé l'histoire du Rwanda. "Au moins les Tutsis, dans une certaine mesure, étaient unis", a-t-il déclaré.

Hassan Ngeze a indiqué qu'en 1992, il avait soutenu le parti Coalition pour la défense de la République (CDR) parce qu'il demandait "aux Rwandais de s'asseoir autour D'une table et de discuter de la question ethnique hutu-tutsie". D'après lui, au Rwanda il n'y a jamais eu de véritable débat sur les causes du conflit hutu-tutsi jusqu'à ce jour.

Le parquet allègue que le parti CDR et la revue Kangura prônaient l'idéologie hutue extrémiste, ce que Hassan Ngeze nie.

Selon le procureur, Kangura "publiait des articles et des caricatures divisionnistes appelant à la haine ethnique et publiait les noms et les photos des personnes considérées comme les complices de l'ennemi". Hassan Ngeze estime pour sa part que la revue Kangura est une reproduction de l'histoire mouvementée du Rwanda.

l'ancien journaliste affirme qu'il a souvent alerté les autorités compétentes sur ce qui allait se passer mais qu'elles l'avaient simplement traité de "paranoïaque".

Le parquet a cité quarante-sept témoins dans ce procès. Hassan Ngeze les a traités de "menteurs."

Hassan Ngeze est coaccusé avec deux responsables présumés de la Radio-télévision libre des Milles collines (RTLM), Ferdinand Nahimana et Jean-Bosco Barayagwiza. Ce dernier boycotte ce procès depuis son commencement en octobre 2000, alléguant que le TPIR est manipulé par le gouvernement rwandais.

Début du contre-interrogatoire
En début de son contre-interrogatoire, Hassan Ngeze a confirmé qu'il était responsable de Kangura. "C'était mon journal. Même si parfois certains articles étaient publiés quand J'étais en prison", a-t-il expliqué.

l'accusé a cependant déclaré assumer la responsabilité de tous les articles de Kangura, pour autant qu'il n'y a pas eu de démenti. l'accusé avait auparavant déclaré qu'il avait été maintes fois mis en prison pour ses articles. "La prison, c'était mon deuxième domicile", a-t-il rapporté.

Le parquet allègue que "en tant que rédacteur en chef du journal Kangura, Hassan Ngeze avait un contrôle sur les employés de sa rédaction, y compris les journalistes".

Hassan Ngeze s'est défini comme "un enquêteur spécial, une des rares personnes qui connaît ce qui s'est passé au Rwanda et dans la région des Grands Lacs avant et après 1994 ".

l'ancien journaliste était contre-interrogé par la représentante kenyane du parquet, Me Charity Kagwi-Ndungu. Me Kagwi a suggéré que Ngeze connaissait l'existence D'un plan de massacres de Tutsis en cas de reprise de la guerre au Rwanda en 1994. Hassan Ngeze a répondu par la négative, ajoutant: "J'ai essayé de publier, de faire connaître les conséquences de la guerre, si elle reprenait."

l'accusé a par ailleurs réitéré qu'il avait sauvé des Tutsis persécutés entre avril et juillet 1994, contrairement aux allégations du procureur.

La déposition de Ngeze se poursuit mercredi devant la première chambre de première instance du TPIR présidée par la juge sud-africaine Navanethem Pillay et composée en outre des juges norvégien Erik Mose et sri-lankais Asoka de Zoysa Gunawardana.

AT/CE/GF/FH (ME'0401A)