05.10.07 - TPIR/TRANSFERTS - DEBAT AUTOUR DU TRANSFERT DES ACCUSES DU TPIR VERS LE RWANDA

  Arusha, 5 octobre 2007 (FH) - Le projet du procureur du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) de transférer des accusés vers Kigali afin qu'ils y soient jugés suscite un débat qui ne fait que commencer, alors que le tribunal entrera dans deux mois dans sa dernière année d'activité.

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  Récemment, le chef de l'accusation a demandé que quatre accusés, dont trois détenus à Arusha, soient déférés devant la justice rwandaise en perspective de la fin du mandat du TPIR en décembre 2008.   Les avocats des trois personnes détenues à Arusha ont vigoureusement dénoncé cette requête bien avant le débat très attendu devant une chambre ad hoc. La responsabilité de ces transferts incombe en effet aux juges du TPIR. En cas de refus, le TPIR pourra difficilement s'acquitter de sa tache de les juger d’ici le 31 décembre 2008.   En attendant, dans une lettre conjointe adressée au président de l’Association des avocats exerçant au TPIR (ADAD), avec copies au président du Conseil de sécurité de l’ONU et aux hauts responsables du TPIR, les avocats des trois détenus visés par la requête demandent la solidarité de leurs confrères. Des avocats et quelques organisations de droits de l'homme ont en effet déjà émis des doutes sur l’impartialité de la justice rwandaise à l'égard des responsables du génocide. Une reunion de l'ADAD est prévue samedi à Arusha.   Les avocats directement concernés estiment pour leur part qu’il est important, dans l’intérêt de la justice, « que des mesures urgentes soient prises aux fins de compromettre la réalisation de cette malsaine, dangereuse et diabolique entreprise concoctée depuis Kigali au bénéfice de l’accusation».   Les détenus qui font l’objet de demandes de transfert sont l’ancien commandant du camp militaire de Ngoma à Butare (sud), le capitaine Ildephonse  Hategekimana ainsi que Gaspard Kanyarukiga et Yussuf Munyakazi, deux hommes d’affaires. Ils sont respectivement défendus par le Togolais Ahlonko Robert Dovi, le Congolais Ernest Bahati Midagu et le Tanzanien Jwani Thimothy Mwaikusa. Selon eux « l’équité et l’impartialité des juridictions rwandaises demeurent de vains mots ».   Cette position contraste avec celle exprimée par le procureur qui affirme que la justice rwandaise répond aux critères d’équité. Selon lui le Rwanda dispose de juges professionnels et indépendants qui connaissent les affaires de génocide depuis plus de dix ans. Il ajoute que les droits de la défense seront pleinement respectés.   Le procureur fait par ailleurs remarquer que le Rwanda a aboli la peine de mort, qui, par le passé, a constitué le principal obstacle à des transferts d’affaires. Il signale enfin que le Rwanda a donné des assurances que des procès des détenus transférés d’Arusha seront suivis par des observateurs internationaux.   A part les trois personnes détenues à Arusha, le procureur a également demandé le transfert vers Kigali d’un accusé en fuite, l’inspecteur de police Fulgence Kayishema.   Invité par une chambre du TPIR à prouver sa capacité à juger Kayishema, le Rwanda a notamment répondu que la Haute Cour, qui devrait connaître cette affaire en première instance, dispose de 26 juges expérimentés et de 19 membres du personnel d’appui formés en droit. En cas d’appel, l’accusé serait jugé par la Cour Suprême qui dispose de 14 juges professionnels et de 8 membres du personnel d’appui formés en droit. Le Rwanda indique par ailleurs que son parquet général compte 14 procureurs et que le barreau de Kigali comprend 280 avocats confirmés.   Six personnes attendent encore au centre de détention des Nations unies d'Arusha d'être jugés, 15 autres sont encore en fuite, 4 sont sous le coup de procédures d’extradition et attendus à Arusha. Tous les détenus sont dans l'ignorance du sort qui va leur être réservé et aucun autre pays que le Rwanda n'a jusqu'à présent montré d'empressement à les juger. Seule la France a accepté de juger deux accusés qui se trouvent actuellement sur son territoire et qui, paradoxalement, ont été réclamés par le TPIR.   S’ils ne veulent pas aller au Rwanda, la seule issue qui semble offerte à ces accusés en attente de jugement serait de plaider coupable. Afin d'accélérer les procédures, le TPIR a admis cette procédure depuis sa création. Sur 33 personnes jugées, 8 seulement ont reconnu leurs torts. Sept ont déjà été condamnées, le huitième, après deux jours d’audience, est dans l'attente d’un jugement qui sera rapide.   Les derniers accusés du TPIR pourraient être tentés par une telle procédure. On ignore cependant si les juges, théoriquement indépendants, entérineront une "libre" décision prise dans le cadre de cette contrainte.   AT-PB/GF   © Agence Hirondelle