24.10.07 - TPIR/BIKINDI - BIKINDI N’A PAS INCITE AUX TUERIES SELON UN LINGUISTE

Arusha, 24 octobre 2007 (FH) - Le musicien Simon Bikindi n’a pas incité aux massacres de Tutsis en 1994 par le biais de ses chansons, a affirmé un expert en linguistique cité par la défense, mercredi devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR).  

2 min 20Temps de lecture approximatif

Le linguiste rwandais résidant en France, Eugène Shimamungu, a analysé trois chansons de Bikindi dont le procureur allègue qu’ils véhiculent un message de haine contre les Tutsis et a conclu que ce n’était pas le cas. Les chansons incriminées sont "Twasezereye" (Nous avons dit adieu à la monarchie), composée en 1987 pour le 25ème anniversaire de l'indépendance, "Akabyutso" (Le Réveil) et "Intabaza" (L’Alerte).

Selon Shimamungu, l’artiste a opposé dans Twasezereye, les acquis de l’indépendance et de la démocratie aux méfaits de la féodalité, de la monarchie et du colonialisme.

Ancienne colonie belge, le Rwanda a obtenu son indépendance en 1962 alors que les Belges s'étaient appuyés sur la minorité tutsie pour gouverner.

S’agissant des deux autres chansons, l’expert a expliqué qu'elles avaient été composées entre 1992 et 1993,  une époque où le pays vivait dans l’insécurité suite à la guerre au nord, et que l’auteur appelle la population à s’unir pour faire face cette situation.

A propos de la chanson Akabyutso dans laquelle, selon le procureur, l’auteur déclare qu’il « déteste les Hutus qui ne détestent pas les Tutsis », l’expert a répondu que l’artiste n’avait jamais eu une telle intention. Il était interrogé par Me Andreas O’Shea, du barreau d’Angleterre et du Pays de Galles, avocat principal de Bikindi.

Selon Shimamungu, Bikindi y fustige des comportements répréhensibles notamment ceux des Hutus « qu’on incite à la haine et suivent ceux qui les y incitent et sont entraînés dans cette haine ».

L’expert a également affirmé que, dans Intabaza, Bikindi n’avait pas non plus encouragé les Hutus à faire front commun pour lutter contre les Tutsis.  « Il n’y a rien pour étayer cette assertion parce que l’auteur, lui, dit : personne n’a choisi de  naître Hutu, Tutsi ou Twa. Nous sommes égaux. Il faut réclamer des élections en vue d’une démocratie intégrale. C’est ça le message qui est véhiculé par cette chanson », a affirmé l’expert témoin.

Le procureur qui, a entamé le contre-interrogatoire de l’expert mercredi après-midi, allègue que ce témoignage est « biaisé ». Il a pour sa part déja cité deux experts dans cette affaire : le linguiste rwandais vivant en France, Jean de Dieu Karangwa, et l’historien Gamaliel Mbonimana, qui ont expliqué que Bikindi avait chanté la haine contre les Tutsis.

Bikindi, qui plaide non coupable a été arrêté aux Pays Bas en juillet 2001. Son procès a commencé le 18 septembre 2006.

AT/PB/GF

 © Agence Hirondelle