15.05.08 - RWANDA/RESCAPES - ASSASSINAT D'UNE RESCAPEE DU GENOCIDE A MUHANGA

Muhanga (sud du Rwanda), 15 mai 2008 (FH) - Madame Geneviève Mukanyonga, 90 ans, rescapée du génocide des Tutsi de 1994, a été assassinée la semaine dernière et ses voisins ont avoué le crime peu aprés, a appris sur place l'Agence Hirondelle.

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Selon un voisin, la vieille femme, qui était impotente et avait perdu tous ses enfants pendant le génocide, vivait seule. Son corps a été retrouvé complètement carbonisé dans sa maison, vendredi dernier.

Six habitants du village, dont l'age varie entre 24 et 77 ans ont reconnu cet assassinat qui serait motivé par la crainte d'être mis en cause devant un tribunal gacaca pour les pillages de 1994. « Nous nous sommes introduits chez elle vers 10 h du matin, nous l'avons attachée à son lit, aspergée d'essence et nous avons mis le feu », a dit calmement le septuagenaire Eulade Nsabimana, détenu, avec ses complices à la station de police de Muhanga .

« Après cet assassinat survenu en plein jour, nous avons directement conclu à une complicité collective et nous avons rassemblé tout le village. Douze heures après, les aveux ont commencé, et nous avons procédé aux arrestations », a expliqué un membre de la police locale. Les assassins de Madame Mukanyonga sont tous ses voisins et habitent la cellule Mata, secteur Muhanga du district de Muhanga. Il s'agit de messieurs Xavier Bizigihe, Emmanuel Nsengiyumva, Kamana, Pasteur Munyaneza alias Khaddafi, le vieux Eulade Nsabimana et son fils Shyaka, a constaté l'Agence.

Tous sont impliqués dans le pillage des biens ayant appartenu à la défunte pendant le génocide des Tutsi de 1994, a appris l'Agence. "Nous sommes mis en cause pour pillage de ses biens devant la juridiction gacaca dans un procès qu'elle devait intenter contre nous, et nous avions peur de réparer », ont-ils déclaré à l'Agence

«Les génocidaires sont toujours là. Comment voulez-vous que nous sentions en sécurité maintenant qu'ils ont opté pour nous tuer en pleine journée ? Une façon de montrer qu'ils sont toujours là et décidés quoi ! », confie à l'Agence une jeune femme rencontrée sur place, l'air aux abois. « Nous avons toujours dit qu'on ne fait pas assez pour punir et décourager les génocidaires. Pas assez pour sécuriser les rescapés et témoins du génocide. Tuer en plein jour, c'est une façon de narguer ou défier l'autorité », s'est indigné, sous couvert d'anonymat, un officiel d'Ibuka, le collectif des associations des rescapés du Génocide.

Selon cette association, l'assassinat de Geneviève Mukanyonga, porte le nombre des victimes de tels actes à 167 depuis 1995. Au cours du premier trimestre 2008, 12 personnes ont déja été tuées, explique un rapport encore inédit d'Ibuka.

SRE/PB/GF

© Agence Hirondelle