04.09.08 - TPIR/SETAKO - LE PROCES SETAKO S’OUVRE PAR DE TRES LONGS TEMOIGNAGES

Arusha, 4 septembre 2008 (FH) - Depuis le début, le 25 août, du procès du lieutenant-colonel Ephrem Setako, accusé de crimes de génocide, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre, la chambre a entendu, parfois en s'en plaignant, de très longs témoignages de personnes condamnées ou poursuivies pour leur implication dans le génocide de 1994.

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En 9 jours d'audience, 3 témoins seulement sur les 25 annoncés ont terminé leur déposition et le dernier d'entre eux pourrait d'ailleurs être rappelé à barre, en fonction de la décision des juges sur une requête pendante de la défense.

A l'ouverture du procès, la représentante du bureau du procureur, Ifeomi Ojemini - Okali avait clairement indiqué que pour établir les six chefs d'accusation portés contre cet ancien cadre supérieur au ministère de la Défense, elle allait présenter, entre autres témoins, des auteurs matériels du génocide, « des complices » de Setako selon le propre terme de cette juriste nigériane.

Mais le rythme actuel des audiences contraste avec la célérité acquise, depuis quelques années, par le procureur dans la présentation de ses moyens de preuve.

Dans le procès de l'ex-ministre des Finances Emmanuel Ndindabahizi, pour ne citer que celui-ci, les 15 témoins de l'accusation s'étaient succédés à la barre en l'espace de 12 jours d'auditions, en 2003.

La thèse du procureur n'en a pas moins été « prouvée au-delà de tout doute raisonnable », puisque l'ex-ministre a été reconnu coupable et condamné à la prison à vie aussi bien en première instance qu'en appel.

Les témoins appelés à ce jour dans l'affaire Setako n'ont pas véritablement ciblé le rôle imputé à l'accusé dans le génocide de 1994.

Le conseil principal de la défense, Lennox Hinds s'en est d'ailleurs plaint à plusieurs reprises, demandant aux juges de donner des instructions claires à la partie adverse à laquelle il reprochait de perdre « le temps précieux » de la chambre.

Mais derrière ce souci affiché d' « économie judiciaire », la véritable préoccupation du professeur américain était d'empêcher Mme Okali de jeter les bases de sa thèse, soit celle d'une « entreprise criminelle commune » entre l'accusé et d'autres responsables civils ou militaires : l'ex-maire de Mukingo, Juvénal Kajejijeli, condamné définitivement, l'ex-secrétaire général du MRND, Joseph Nzirorera qui n'a pas encore présenté sa défense devant le TPIR, et l'ex- chef d'Etat-major de l'armée, le général Augustin Bizimungu, également en procès devant ce tribunal des Nations unies.

C'est là l'un des éléments clés de l'acte d'accusation. « Entres les mois de janvier avril 1994, le colonel Ephrem Setako a participé à des réunions régulières avec des personnes influentes des communes de Nkuli et de Mukingo, dont Joseph Nzirorera, le colonel (plus tard général) Augustin Bizimungu, Juvénal Kajelijeli et divers dirigeants politiques, hommes d'affaires et membres de l'administration locale et régionale, pour inciter à commettre, préparer et planifier le meurtre des Tutsis », allègue le procureur.

Me Hinds, entré dans cette affaire, après avoir plaidé en vain l'acquittement de Kajelijeli, a tenté mardi de dispenser les juges de l'audition de longs récits dans lesquels les témoins ne mettent pas directement en cause son nouveau client. Il a dénoncé une tentative de lier Setako à des crimes commis par d'autres.

« Requête prématurée », a rétorqué Mme Okali, expliquant que ce n'est qu'au bout du compte que les juges pourront évaluer ce lien. La chambre présidée par le juge norvégien Erik Mose n'a pas voulu se mêler de la stratégie du bureau du procureur mais lui a quand - même conseillé de se limiter aux éléments de preuve vraiment nécessaires.

Le procès se poursuit au même rythme. Vingt cinq témoins sont annoncés pour l'accusation.

ER/PB/GF

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