Ingrid Betancourt, Franco-colombienne séquestrée pendant six ans par les Farc, s'est dite mardi "indignée" par la décision d'un tribunal spécial en Colombie, qui a sanctionné plusieurs dirigeants de l'ancienne guérilla pour des milliers d'enlèvements tout en leur évitant la prison.
Presque une décennie après avoir déposé les armes, les chefs de l'ex-guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc) ont mardi été reconnus coupables de plus de 21.000 enlèvements en un demi-siècle de conflit armé.
La Juridiction spéciale pour la paix (JEP), issue de l'accord de paix de 2016, a ordonné à sept anciens commandants de la guérilla marxiste, longtemps l'une des plus puissantes d'Amérique latine, d'apporter réparation à leurs victimes par des actions telles que la participation à la recherche de disparus et à des campagnes de déminage.
La cour a précisé qu'ils seraient également soumis à une "surveillance permanente grâce à un dispositif électronique".
En entendant le jugement, "je me suis sentie indignée, je me suis sentie humiliée, flouée", a déclaré à l'AFP la politicienne de 63 ans lors d'un entretien vidéo depuis la France où elle réside la plupart du temps.
L'accord de 2016 entre les Farc et l'État prévoit des peines alternatives à la prison pour les guérilleros en échange du dépôt des armes, de la réparation des victimes et de la révélation de la vérité sur les crimes commis.
Pour Mme Betancourt, opposée à cet accord qui garantit selon ses détracteurs l'impunité aux auteurs de crimes, la JEP a "favorisé" les anciens chefs guérilleros avec cette décision "déconcertante".
"Les magistrats de la JEP ont un parti pris en faveur des Farc, c'est très grave", a-t-elle estimé.
Elle a annoncé vouloir se tourner vers des instances internationales comme la Cour pénale internationale pour faire renverser le jugement.
Mme Betancourt avait été enlevée en 2002 sur une route dans une zone forestière alors qu'elle faisait campagne pour la présidence.
Après la révélation de photos la montrant amaigrie, elle était devenue le visage le plus connu de ce fléau. Elle avait été libérée en 2008, lors d'une opération de sauvetage menée par l'armée.