Sri Lanka: projet controversé de pouvoirs accrus pour le président

Le parti au pouvoir au Sri Lanka a dévoilé mardi un projet attendu de révision constitutionnelle pour accroître les pouvoirs présidentiels, à la colère de l'opposition qui dénonce un danger pour la démocratie.

Le projet soumis aux députés prévoit la suppression de tout contrôle législatif et judiciaire du président Gotabaya Rajapaksa en matière de droits humains et de dépenses publiques et lui octroie le droit de nommer les juges de la Cour suprême.

Il rétablit également le pouvoir du président de dissoudre le Parlement dès la fin de la première année des cinq ans de législature et abolit la législation garantissant l'indépendance de la justice, la police, la fonction publique et la commission électorale.

Le chef de l'opposition, Sajith Premadasa, a dénoncé un projet qui déboucherait selon lui sur "une dictature élue" dans ce pays de 21 millions d'habitants.

"C'est le jour le plus noir pour la démocratie dans le pays", a déclaré M. Premadasa. Les députés de son camp arboraient des brassards noirs en signe de protestation.

Gotabaya Rajapaksa, l'un des plus hauts gradés de l'armée lorsque son frère aîné Mahinda était président (2005-2015), a été lui-même élu président en novembre dernier et a nommé Mahinda Premier ministre.

L'alliance des frères Rajapaksa a remporté en août les élections législatives, s'assurant les deux tiers des sièges au Parlement, ce qui devrait permettre l'adoption du projet.

Les Rajapaksa jouissent d'une grande popularité au sein de l'ethnie cinghalaise majoritaire pour avoir mis fin en 2009, au prix d'un gigantesque bain de sang, à quatre décennies de guerre civile avec la minorité tamoule, un conflit qui a fait 100.000 morts selon l'ONU.

Mais ils sont également critiqués par la communauté internationale. Les défenseurs des droits humains les accusent de crimes de guerre, estimant que 40.000 civils tamouls ont péri dans les derniers mois du conflit, des chiffres contestés par le gouvernement.

Aucun des deux frères n'a commenté le projet présenté mardi. Mais le président a indiqué voilà deux semaines qu'il permettrait de "supprimer les obstacles imposés" par la réforme constitutionnelle du gouvernement précédent pour limiter les pouvoirs présidentiels et empêcher l'émergence d'un nouvel homme fort.

La semaine dernière, la Haut-commissaire de l'Onu aux droits de l'homme Michelle Bachelet a demandé au Conseil des droits de l'homme des Nations unies de prêter attention au Sri Lanka, évoquant une intimidation croissante des journalistes, avocats et défenseurs des droits.

Le gouvernement a parallèlement menacé de retirer le Sri Lanka du Conseil des droits de l'homme de l'Onu s'il persistait à accuser Colombo de crimes de guerre.

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