Un groupe d'éminents experts du droit du travail a exprimé sa "profonde inquiétude" face au traitement des minorités ethniques et religieuses en Chine, notamment au Xinjiang et exhorté Pékin à changer ses méthodes, dans un rapport de l'Organisation internationale du travail.
Ce comité formé de 20 experts indépendants chargés d'évaluer l'application des conventions de l'OIT exprime "sa profonde inquiétude au regard des orientations des politiques" répertoriées dans de nombreux documents officiels chinois, dans ce rapport rapport annuel destiné à faire le point sur le respect des conventions de l'OIT pays par pays.
Dans sa réponse détaillée jointe au rapport, Pékin a une nouvelle fois rejeté en bloc les accusations, tout particulièrement de travail forcé portées par la Confédération syndicale internationale (CSI) dans le document et corroborées par de nombreuses publications d'ONG. Ce sont des accusations "fausses et motivées politiquement", rétorque le gouvernement chinois.
- Centres de rééducation -
Selon des organisations de défense des droits humains, au moins un million de Ouïghours et membres d'autres minorités turcophones, principalement musulmanes, sont ou ont été incarcérés dans des camps dans cette région du nord-ouest de la Chine.
Pékin affirme qu'il s'agit de centres de formation professionnelle destinés à les éloigner du terrorisme et du séparatisme.
Le sujet préoccupe la communauté internationale. Ainsi une loi interdisant l'achat de produits qui seraient issus du travail forcé des Ouïghours en Chine est entrée en vigueur en décembre aux Etats-Unis, qui accusent la Chine de génocide contre la minorité.
Le comité d'experts exige pour sa part de Pékin qu'il "réoriente le mandat des centres de formation professionnelle et d'éducation" qui sont actuellement "des centres de rééducation politique basés sur des détentions administratives".
Il exhorte la Chine à faire en sorte que les activités de formation professionnelle et de placement "aident les minorités ethniques et religieuses (...) dans leur propre intérêt et en accord avec leurs aspirations, en tenant compte des besoins de la société".
Les experts ont aussi demandé à Pékin de cesser de faire porter "le poids de la déradicalisation sur les entreprises et les syndicats en les empêchant par là même de remplir leur rôle respectif (...)".
Le comité demande que les autorités chinoises l'informent de manière détaillée sur les mesures prises pour respecter leurs engagements internationaux en matière d'égalité de traitement dans les centre de formation professionnelle du Xinjiang ou encore pour ce qui concerne "les Ouïghours et autres minorités ethniques quand ils cherchent à être employés en dehors du Xinjiang".
Dans sa réponse, le gouvernement chinois affirme que "sous sa houlette, le Xinjiang a fait de grands progrès" et accuse le CSI d'avoir "ignoré les progrès en matière de développement économique, de lutte contre la pauvreté, d'amélioration du niveau de vie et les efforts pour avoir un emploi décent au Xinjiang".
- "Mettre fin au génocide" -
Les Etats-Unis comme le Royaume uni ont salué le ton critique du rapport.
Le Département d'Etat a demandé à la Chine "de prendre les mesures réclamées" par le Comité et de mettre fin "au génocide et aux crimes contre l'humanité perpétrés" au Xinjiang.
L'ambassadeur du Royaume Uni auprès de l'ONU à Genève Simon Manley a salué le rapport et demandé à ce que la Chine "accorde un accès sans entrave au Xinjiang" à la Haute commissaire de l'ONU aux droits de l'homme ou un autres expert.
Michelle Bachelet demande de longue date à pouvoir mener l'enquête sur place.
Pékin refuse toute idée d'enquête de l'ONU au Xinjiang et estime que toute visite à la région doit être "amicale".
Le Haut-commissariat doit aussi publier prochainement un rapport sur les droits de l'homme au Xinjiang.