Si la résolution donnant à l'Ouganda le statut d'Etat hôte a été adoptée par consensus, elle ne fait pas l'unanimité du coté des organisations non gouvernementales. En marge des débats de la septième assemblée des Etats parties, qui s'est tenue à La Haye du 14 au 21 novembre, le Club des amis du droit du Congo, une organisation congolaise de défense des droits de l'homme, s'est opposée à la proposition ougandaise.
Ainsi, le président de l'association, Eugène Bakama Bope, s'est interrogé : « Comment peut-on parler de l'agression dans un pays qui a été condamné par la Cour internationale de Justice ? » Le 19 décembre 2005, la Cour internationale de Justice - qui est chargée de régler les différends entre Etats - avait condamné l'Ouganda, au terme d'une plainte déposée par la République démocratique du Congo (RDC), pour s'être livré à des activités militaires en Ituri, à l'est de la RDC, en soutenant des milices, et d'avoir ainsi « violé le principe de non recours à la force dans les relations internationales ». L'Ouganda avait été en outre condamné à payer des réparations.
Le Club des amis du droit du Congo reproche, en outre, au gouvernement ougandais son attitude envers la CPI. Saisi par l'Ouganda, le procureur avait ouvert une enquête en 2004, puis délivrer cinq mandats d'arrêt à l'encontre des chefs de l'Armée de résistance du Seigneur (LRA), une milice du nord de l'Ouganda, opposée au régime du président Museveni. Depuis, les rebelles - dont leur chef, Joseph Kony - conditionnent leur signature en bas d'un accord de paix au retrait des mandats émis par la Cour. Pour Eugène Bakama Bope, « le gouvernement utilise la CPI pour faire pression sur les rebelles, argue-t-il. Mais la LRA continue de commettre des crimes en RDC [où la milice est désormais engagée, ndlr]. Je vois mal comment la LRA peut être un interlocuteur pour la paix. »
Pour le militant, mais aussi pour les ONG internationales, d'autres états, plus neutres par rapport à la Cour, comme le Kenya, l'Afrique du Sud ou la Tanzanie, auraient été de meilleurs candidats pour la tenue d'une telle conférence. Ainsi, selon Géraldine Mattioli, de Human Rights Watch, « il aurait été préférable que les états choisissent un pays sur lequel le procureur n'enquête pas ». Mais pour le ministre de la Justice ougandais, Frederick Ruhindi, « l'Ouganda est au cœur de la région des Grands lacs » et la tenue de cette conférence de révision à Kampala « offrira une chance aux Etats parties, mais aussi à la société civile et surtout, aux milliers de victimes de la région, de mieux connaître la Cour ».
Concernant les mandats émis contre les rebelles de la LRA et non exécutés, le ministre de la Justice dit espérer qu'à terme, « nous parviendrons à l'objectif recherché ». Nombre d'observateurs estiment que l'Ouganda ne remettra pas les rebelles à la Cour. Le gouvernement leur a donné jusqu'au 30 novembre pour signer les accords de paix.
SM/PB/GF
© Agence Hirondelle