22.12.08 - TPIR/LIBERATION - LE TPIR NE SAIT QUE FAIRE DE SES PRISONNIERS LIBERES

Arusha, 22 décembre 200 (FH) - Le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), créé pour juger les organisateurs du génocide de 1994 au Rwanda, est toujours embarrassé par les libérations qui surviennent soit après un acquittement, soit à l'issue d'une peine de prison.

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Un nouvel acquitté, Gratien Kabiligi, ancien général, est venu rejoindre la semaine dernière André Ntagerura, ancien ministre, qui depuis février 2006 cherche un pays d'accueil. Il sera hébergé et nourri par le tribunal. Quatre précédents acquittés ont, après des attentes variables, trouvé refuge en France ou en Belgique. Ces deux pays ne souhaitent pas en faire une habitude et se montrent de plus en plus réservés devant les nouvelles demandes.

Bien que rien ne soit prévu à leur sujet dans son mandat, le TPIR s'efforce de les aider. Pour Ntagerura, aprés de nombreuses démarches qui se sont avérées vaines, il a transmis le dossier au Haut Commissariat des Nations unies aux réfugiés. L'ancien ministre, qui est devenu une figure du tribunal dont il parcourt inlassablement les couloirs, passant des heures dans la bibliothèque, a personnellement déposé un recours devant les tribunaux canadiens.

Le TPIR est le seul à affronter ce genre de problème. Les libérés de l'autre tribunal « adhoc » créé par les Nations unies, le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, sont accueillis en héros dans le régions d'où ils sont originaires, qui sont devenus des Etats. Pour les Rwandais, qu'ils soient acquittés ou libérés, le retour au pays n'est même pas envisagé.

Pour les libérés, comme Joseph Nzabirinda qui a fini à la fin de la semaine dernière ses 7 années de détention, aucune solution n'est en vue. Il est prié de se fondre dans le paysage africain. Pressé par son avocat qui a fait valoir que Nzabirinda avait fait économiser de l'argent au tribunal en plaidant coupable, le directeur de la prison s'est engagé à l'aider mais cela lui aurait été reproché par les responsables du tribunal car rien n'est prévu à ce sujet. Interrogé par l'agence Hirondelle le porte-parole du TPIR a répondu : «c'est un homme libre».

L'accord de siège signé avec la Tanzanie prévoit juste que ceux qui sortent de prison disposent d'un délai de deux semaines pour quitter le pays. Pour cette raison, les acquittés sont maintenus sous le contrôle du tribunal. Ils ne peuvent théoriquement circuler librement et habitent dans une maison dite sécurisée.

Les libérés en fin de peine sont en revanche laissés à leur sort. Trois personnes l'ont été jusqu'à présent. Le premier Elizaphan Ntakirutimana, qui avait obtenu de rejoindre sa famille aux Etats-Unis, est mort trois semaines après sa sortie dans un institut religieux où il avait été accueilli. Le second, après avoir erré dans les couloirs du TPIR et obtenu un petit pécule, se trouve dans un camp de réfugiés du Malawi. Nzabirinda a demandé à rejoindre la Belgique où se trouve sa famille, et où il a été arrêté alors qu'il y avait le statut de réfugié.

Après avoir bu quelques bières et fêté sa libération avec ses amis, il craignait lundi d'être laissé à son sort et finalement expulsé vers le Rwanda. «Qu'est ce que je fais là ?" s'est il interrogé. « ils n'avaient qu'à me faire juger en Belgique ! Ils m'ont arrêté là bas, qu'ils m'y ramènent !»

PB/GF

© Agence Hirondelle