Des groupes de défense des droits ont dit craindre lundi que le Népal ne laisse impunis les crimes commis durant l'insurrection maoïste dans le royaume himalayen en raison du retard pris par les réformes pour une justice transitionnelle.
Plus de 16.000 personnes sont mortes et plus de 1.000 ont été portées disparues pendant les 10 années de guerre civile qui opposait les forces de sécurité à la guérilla maoïste. Le conflit avait pris fin en 2006 avec l'entrée des maoïstes au gouvernement .
L'accord de paix de 2006 prévoyait la mise en place d'une justice transitionnelle. Après des années de batailles politiques, deux commissions ont été créées en 2015 pour enquêter sur les crimes de guerre, mais aucune enquête n'a été terminée malgré plus de 60.000 plaintes pour des assassinats, viols et disparitions forcées.
Le gouvernement a présenté ce mois-ci un projet de loi visant à modifier les lois existantes relatives aux criminels de guerre, sept ans après que la Cour suprême a ordonné des révisions pour empêcher l'amnistie des auteurs de violations graves des droits humains.
Mais Amnesty International, Human Rights Watch (HWR) et d'autres organisations internationales de défense des droits ont jugé, dans un communiqué conjoint, que les amendements proposés rendraient toujours difficile, voire impossible, la poursuite des criminels de guerre.
"Les victimes et leurs familles sont déçues après avoir attendu impatiemment des amendements à la loi, dans l'espoir que leurs demandes de vérité et de justice soient satisfaites", a déclaré Mandira Sharma de la Commission internationale de juristes.
"Malgré la promesse de réforme, ce projet de loi, s'il est mis en oeuvre tel qu'il est aujourd'hui, empêchera que de nombreux auteurs soient traduits en justice", a-t-elle ajouté.
Plusieurs autres aspects des réformes proposées, y compris les limitations du droit de recours, sont également en deçà des normes internationales, s'inquiètent les organisations dans leur communiqué.
Suman Adhikari, dont le père a été tué par des rebelles maoïstes en 2002, estimé que les amendements proposés ne répondaient pas aux préoccupations des victimes.
"Nous avons le sentiment que nous n'obtenons pas justice", a-t-il déclaré à l'AFP, ajoutant que les réformes semblaient encore "conçues pour accorder l'amnistie à tous les coupables".
Le processus de vérité et de réconciliation au Népal a été mal conçu dès le départ et demeure entravé par un manque de financement et de volonté politique, en raison de la présence de nombreux anciens rebelles maoïstes dans les rangs du gouvernement, accusent ses détracteurs.
La justice n'a été saisie jusqu'ici que de deux cas de crimes de guerre concernant le meurtre d'une adolescente et celui d'un journaliste.