Les crises électorales au Kenya

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Le Kenya, où le candidat malheureux à la présidentielle Raila Odinga a déposé lundi un recours contre l'élection de William Ruto, a connu plusieurs périodes électorales marquées par des contestations de résultats, voire des violences meurtrières.

Le scrutin du 9 août s'est déroulé dans le calme, mais l'annonce le 15 de la victoire du vice-président sortant a déclenché ce jour-là de brèves manifestations de colère dans certains bastions d'Odinga.

- 1992: première élection multipartite

Le 29 décembre 1992, Daniel arap Moi, au pouvoir depuis 1978, est élu président lors du premier scrutin multipartite face à une opposition divisée.

Des violences opposant les Kalenjin, ethnie minoritaire du président, aux Kikuyu, majoritaires et soutenant les partis d'opposition, précèdent puis suivent le scrutin, faisant des centaines de morts dans la vallée du Rift.

- 2007-2008: violences les plus meurtrières -

Le 27 décembre 2007, des émeutes éclatent après la réélection contestée de Mwai Kibaki à la présidence, face à Raila Odinga, ancien allié devenu rival.

La vallée du Rift devient l'épicentre d'affrontements entre des membres des communautés kalenjin et luo qui ont majoritairement soutenu M. Odinga, et leurs voisins kikuyu, l'ethnie de M. Kibaki.

En février 2008, les deux leaders signent un accord sous la pression de la communauté internationale, aboutissant à un gouvernement de coalition dirigé par Raila Odinga. Les violences ont fait plus de 1.100 morts et 600.000 déplacés, dans un pays jusqu'alors réputé stable.

En mars 2010, la Cour pénale internationale (CPI) autorise l'ouverture d'une enquête pour crimes contre l'humanité sur ces violences et en 2012, ses juges confirment les accusations contre quatre Kényans. Parmi eux, Uhuru Kenyatta, fils du premier président kényan et candidat à la future présidentielle de 2013, ainsi que William Ruto, son colistier.

Le 4 mars 2013, Uhuru Kenyatta remporte la présidentielle.

Le 8 octobre 2014, il devient le premier chef d'État à comparaître en cours de mandat devant la CPI.

En décembre, la Cour abandonne les poursuites contre lui, faute de preuves suffisantes. En 2016, elle abandonne pour la même raison des poursuites contre son vice-président William Ruto.

- 2017: présidentielle annulée -

La présidentielle est remportée par Uhuru Kenyatta face à Raila Odinga, qui rejette les résultats, manipulés, selon lui, par piratage informatique, et dépose un recours. Des émeutes et des pillages ont lieu dans des fiefs de l'opposition.

Le 1er septembre, la Cour suprême invalide le scrutin pour "irrégularités" et ordonne une nouvelle élection, une première en Afrique.

En octobre, Uhuru Kenyatta est réélu lors d'un nouveau vote boycotté par l'opposition et terni par un faible taux de participation (39%).

Des violences post-électorales font des dizaines de morts, principalement lors de la brutale répression des manifestations de l'opposition par la police.

En 2018, Kenyatta et Odinga sidèrent le pays en se serrant la main et en déclarant une trêve, un retournement d'alliance toutefois courant au Kenya. Le vice-président William Ruto, endosse progressivement le rôle d'opposant.

- Ruto élu, Odinga conteste -

Le 9 août 2022, la présidentielle se déroule dans le calme.

Le 15, après six longs jours d'attente, le président de la Commission électorale (IEBC) déclare William Ruto vainqueur avec 50,49% des voix, devant Raila Odinga. Peu avant cette annonce, les résultats ont été rejetés par la majorité des membres de la Commission lors d'une conférence de presse inattendue. Quelques violences éclatent dans des bastions de Raila Odinga.

Le 16, Raila Odinga rejette les résultats, qualifiés de "parodie". Il appelle ses partisans au calme et promet de poursuivre "toutes les options légales" disponibles.

Le 18, le président sortant Uhuru Kenyatta assure que la transition se fera "en douceur".

Le 22, Raila Odinga dépose un recours contre les résultats de la présidentielle devant la Cour Suprême, qui a 14 jours pour rendre sa décision. En cas d'annulation du scrutin, une nouvelle élection doit se tenir dans les 60 jours.