03.03.09 - RWANDA/GACACA - UN JUGE SUR LE BANC DES ACCUSES

Kigali, 03 mars 2009 (FH) - Aboubakar Karemera, président d'une juridiction gacaca de la ville de Kigali, est lui-même accusé de complicité de génocide et crimes contre l'humanité, a appris mardi l'agence Hirondelle.

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Président de la juridiction gacaca de la cellule Munanira du secteur Nyakabanda dans la capitale rwandaise, Karemera est notamment poursuivi pour « détention illégale d'une arme à feu » et participation à la tenue d'un barrage routier pendant le génocide perpétré contre les Tutsis en 1994. Enfin, à l'avènement des juridictions gacacas, il aurait délibérément caché des dossiers de génocidaires présumés. Il voulait ainsi, selon l'acte d'accusation, soustraire à la justice trois hommes et une femme, Marie Nyiramitero. Cette dernière est accusée d'incitation et encouragement à commettre le génocide ainsi que d'actes inhumains et dégradants.

Dimanche dernier, des témoins ont rapporté qu'une femme tutsie enceinte, inconnue dans la cellule Munanira, avait été sauvagement tuée et taillée en pièces, avant d'être exposée au niveau du barrage routier, pendant le génocide, selon un des juges gacacas ayant siégé à cette audience. Ils ont souligné que ce meurtre avait été évoqué lors de la phase de « collecte des informations », devant la juridiction gacaca de la cellule. Curieusement, se sont-ils étonnés, Karemera qui était chargé de coordonner cette collecte n'a établi aucun dossier relativement à cette affaire, a ajouté le juge.

Le jugement devrait être rendu dimanche prochain.

Les juridictions gacacas (prononcer gatchatcha) sont chargées de juger la plupart des auteurs présumés du génocide de 1994 qui a fait, selon l'ONU, près de 800.000 tués, essentiellement parmi l'ethnie tutsie.

Elles sont animées, non pas par des magistrats professionnels, mais par des « personnes intègres » élues parmi la communauté. Cependant, certains de « ces intègres » ont été eux-mêmes accusés d'avoir trempé dans le génocide. D'autres encore ont été arrêtés pour corruption.

La semaine dernière, un juge gacaca de Gikongoro (sud) a reconnu avoir été surpris par la police alors qu'il recevait des mains d'un accusé un billet de 5.000 francs rwandais, soit environ 10 dollars américains.

SRE/ER/GF

Agence Hirondelle