Le Conseil des droits de l'homme de l'ONU refuse de débattre de la Chine, revers américain

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Les États-Unis et leurs alliés ont enregistré un revers au Conseil des droits de l'homme de l'ONU qui a refusé jeudi de débattre de la situation en Chine, après d'intenses pressions de Pékin.

C'est la première fois dans l'histoire du Conseil des droits de l'homme, créé en 2006, qu'un projet de décision visait la Chine.

Les 47 États membres du plus haut organe des droits de l'homme de l'ONU devaient dire s'ils acceptaient ou pas d'organiser un débat sur la région autonome ouïghoure du Xinjiang, dans le nord-ouest de la Chine, où Pékin est accusé de crimes contre l'humanité.

L'issue du vote était très incertaine. Quelques heures avant le scrutin, les Occidentaux avaient déjà fait savoir qu'ils n'écartaient pas une défaite.

Le résultat du vote est très serré : le projet de décision, qui avait été présenté par une dizaine de pays, dont les États-Unis et le Royaume-Uni, a été rejeté avec 19 voix contre, 17 pour et 11 abstentions.

"Les tentatives de la Chine pour étouffer le débat et cacher la vérité ne réussiront pas", a réagi sur Twitter l'ambassadeur britannique Simon Manley.

Pékin a reçu le soutien de ses alliés traditionnels, tels que Cuba et le Venezuela, mais également du Pakistan et de l'Indonésie, deux grands pays musulmans, ainsi que de pays africains.

Ces dernières semaines, la Chine a exercé en coulisse à Genève d'importantes pressions sur les pays pour contrer toute initiative à son encontre.

- "Manipulation" -

Le vote des pays africains membres du Conseil était très attendu, en raison de l'influence croissante de la Chine sur ce continent.

Selon une analyse publiée en septembre par des défenseurs des droits humains, les pays africains cèdent de plus en plus aux pressions chinoises lors des scrutins au Conseil.

La Chine, qui a largement investi ces dernières années en Afrique, notamment dans les infrastructures et dans l'exploitation de ses matières premières, est devenue la première créancière de certains pays africains.

Pendant les débats jeudi au Conseil, l'ambassadeur chinois Chen Xu a dénoncé la "politisation" du Conseil des droits de l'homme, et comparé le projet de décision à un "exemple typique de manipulation".

L'ambassadeur chinois a également mis en garde les autres pays en développement et appelé à leur solidarité :

"En présentant ce texte, les États-Unis et les autres auteurs s'efforcent de prendre des raccourcis dangereux. (...) C'est aujourd'hui la Chine qui est prise pour cible, demain il pourrait s'agir de tout autre pays en développement".

Le projet de décision faisait suite à la publication le 31 août d'un rapport du Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme sur le Xinjiang qui évoque de possibles "crimes contre l'humanité" et des "preuves crédibles" de tortures ainsi que de violences sexuelles et appelle la communauté internationale à agir.

La France regrette le rejet du texte jeudi et souligne que le rapport de Mme Bachelet "est important et ses conclusions sont très préoccupantes (...) Ce rapport pose des questions fondamentales et démontre qu'il ne peut pas y avoir deux poids deux mesures", a réagi l'ambassadeur de France auprès de l'ONU à Genève, Jerôme Bonnafont.

Depuis plusieurs années, la Chine est accusée - preuves matérielles et documents à l'appui - par des pays occidentaux et des organisations de défense des droits de l'homme d'avoir enfermé au Xinjiang plus d'un million de Ouïghours et d'autres membres de minorités majoritairement musulmanes, y compris des Kazakhs, dans des camps.

Pékin a rejeté avec véhémence ces accusations et accusé l'ONU de devenir "le sbire et le complice des États-Unis et de l'Occident".