Ukraine: le procureur de la CPI met en garde contre un tribunal spécial

1 min 32Temps de lecture approximatif

Le projet d'un tribunal spécial pour juger les crimes de la Russie en Ukraine pourrait "vouer à l'échec" l'enquête en cours de la Cour pénale internationale (CPI), a averti lundi le procureur de la juridiction.

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a proposé mercredi la mise en place d'un tribunal spécial soutenu par les Nations unies pour poursuivre en justice les crimes d'agression de la Russie contre l'Ukraine.

Karim Khan, le procureur de la CPI, a en réponse exhorté la communauté internationale à se concentrer sur le soutien - et le financement - de la CPI, qui mène actuellement sa propre enquête sur les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité en Ukraine.

"Nous ne pouvons pas être voués à l'échec. Nous avons besoin des outils nécessaires pour faire le travail. Nous n'avons pas ces outils", a déclaré M. Khan devant les journalistes dans le cadre d'une réunion annuelle des 123 pays membres de la CPI à La Haye.

Le procureur a affirmé qu'il y avait eu "beaucoup de promesses que toute initiative (pour un tribunal spécial) ne saperait pas la Cour", mais que la CPI était déjà confrontée à un déficit budgétaire.

"Nous devrions éviter la fragmentation et préférer plutôt la consolidation", a-t-il lâché.

La CPI n'est compétente que pour les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité perpétrés en Ukraine et non pour les "crimes d'agression" de la Russie, car Moscou n'est pas signataire du traité de Rome instituant la Cour.

"Un tribunal ad hoc compétent pour les crimes d'agression permettrait de poursuivre en justice les plus hauts dirigeants russes qui autrement jouiraient d'une immunité", a expliqué la Commission européenne.

Selon M. Khan, les Etats membres pourraient trouver des moyens pour permettre à la CPI de poursuivre un pays non membre pour le crime d'agression.

Bruxelles s'est également trompée sur l'immunité des dirigeants russes, a estimé le procureur, ajoutant qu'il aborderait la question avec Ursula von der Leyen en personne.

"L'UE a manifestement déformé la loi", a-t-il déclaré.

"Ils ne semblent pas avoir été dotés d'une compréhension complète du Statut de Rome", a-t-il ajouté.

L'Ukraine et plusieurs pays occidentaux ont soutenu les appels à un tribunal spécial, et les Pays-Bas ont proposé de l'héberger.

Moscou estime qu'un tel tribunal serait illégitime.