21.01.10 - TPIR/MILITAIRES I - LE COLONEL THEONESTE BAGOSORA A DEPOSE SON « AVIS D'APPEL »

Arusha, 21 janvier 2010 (FH) - Le détenu le plus célèbre du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), le colonel Théoneste Bagosora, ancien directeur de cabinet au ministère de la Défense, a déposé son « avis d'appel », une année après sa condamnation , a-t-on appris jeudi de source judiciaire.

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Dans ce texte de 19 pages consulté jeudi sur le site internet du tribunal, Me Raphaël Constant, l'avocat de Bagosora, demande à la chambre d'appel de « renverser les condamnations et consigner un verdict d'acquittement », ou, à défaut, « ordonner la tenue d'un nouveau procès ». Cet avis d'appel sera complété dans les prochaines semaines par le mémoire d'appel proprement dit. Après quoi, une date sera fixée pour l'audience d'appel.

Le 18 décembre 2008, Bagosora, le lieutenant-colonel Anatole Nsengiyumva et le major Aloys Ntabakuze, se sont vu infliger la perpétuité tandis que le dernier co-accusé, le général Gratien Kabiligi, était acquitté.

Condamné pour génocide, assassinats, crimes contre l'humanité et crimes de guerre, celui qui avait été présenté comme « le cerveau » du génocide a été acquitté, en revanche, du crime le plus grave au TPIR, l'entente en vue de commettre le génocide.

Le juge Erik Mose et ses deux collègues ont conclu à la responsabilité de Bagosora dans de nombreuses exactions commises entre 6 avril et le 9 avril 1994 à Kigali et dans la région de Gisenyi (nord) : en particulier les assassinats des 10 Casques bleus belges, du Premier ministre Agathe Uwilingiyimana et d'autres dirigeants politiques de l'opposition.

Me Constant relève, dans son avis d'appel, qu' « aucun témoignage impliquant directement le colonel Bagosora n'a été retenu par la chambre de première instance ».

L'avocat français fait encore valoir que « les condamnations du colonel Bagosora » ont toutes été prononcées « sur la base de la responsabilité de supérieur hiérarchique ». Par ailleurs, poursuit-il, la chambre a conclu  que le colonel exerçait sur les auteurs matériels des crimes, non pas une autorité de droit, mais une autorité de fait.

 « Erreur grave », estime Me Constant qui conteste que son client se soit imposé comme le maître de la situation après l'assassinat du président Juvénal Habyarimana.

«Le 6 avril (1994), il n'a participé à une réunion au siège de l'armée qu'à la demande du chef d'état-major de la gendarmerie », le général Augustin Ndindiliyimana qui attend son verdict devant le même tribunal. « Le rôle qu'il y a joué était conforme à ses stricts pouvoirs de directeur de cabinet du ministère de la défense », département dont dépendaient l'armée et le gendarmerie. Bagosora a toujours affirmé s'être rendu à la réunion en qualité de représentant du ministre de la Défense alors en mission à l'étranger.

L'avis d'appel souligne, en outre, qu'à partir du 7 avril 1994, c'est l'actuel ministre rwandais de la Défense, le général Marcel Gatsinzi qui contrôlait l'armée, en qualité de chef d'état-major intérimaire, en remplacement du général Deogratias Nsabimana, également tué dans l'attentat contre l'avion présidentiel.

Le 18 décembre 2008, le juge Mose n'avait lu qu'un résumé en anglais du jugement.

Bagosora qui, à la différence des deux autres condamnés, ne comprend pas cette langue, avait aussitôt prévenu qu'il ne déposerait son avis d'appel qu'après avoir reçu le jugement intégral en français. Selon son avis d'appel, la version française du jugement, soit 1004 pages, a été transmise aux parties le 10 décembre 2009, un an après le verdict.

ER/GF

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