02.03.10 - RWANDA/GACACA - TROIS RESCAPES SUR LE BANC DES ACCUSES

Kigali, 02 mars 2010 (FH)- Trois rescapés du génocide perpétré contre les Tutsis en 1994 au Rwanda comparaissent depuis lundi devant un tribunal gacaca de Kigali pour leur rôle présumé dans les mêmes massacres, un fait rarissime.

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Poursuivis pour des actes commis à Nyakabanda, un secteur de la capitale rwandaise, Modeste Madengeri, Michel Twagirayezu et Abdou Kamuzinzi, clament leur innocence.

« Je n'ai tué personne. C'est un procès arrangé, juste un règlement de compte », a dénoncé lundi Madengeri, chauffeur au Comité international de la croix rouge (CICR) à Kigali avant et après 1994.

Une dizaine de témoins à charge l'accusent d'avoir participé à la tenue d'un barrage routier où près de 8 Tutsis ont été tués, de port illégal d'une arme à feu et de profanation du corps d'un certain Jean Damascène Gakwaya.

Pourtant la mère d'une victime tuée à ce barrage et le propre fils de feu Gakwaya défendent l'accusé et pointent plutôt du doigt certains de ces témoins à charge, qui sont pour la plupart des personnes contre lesquelles il a eu à témoigner lors de procès antérieurs.

Quant à Michel Twagirayezu, un simple citoyen qui vivait dans le secteur Nyakabanda depuis un mois à peine, il est accusé d'avoir dressé une liste de Tutsis à tuer et d'avoir décimé à un barrage routier une famille tutsie entière.

Tout en larmes, Twagirayezu a affirmé lundi, sans être contredit par qui que ce soit, que des membres de sa propre famille avaient été tués au dit barrage et leurs corps « abandonnés là, en pâture aux chiens et rapaces ». « Où sont mes accusateurs ? », a-t-il demandé. Dans cette salle pleine à craquer, personne ne s'est levé pour lui répondre.

Le troisième accusé, Abdou Kamuzinzi, est accusé d'avoir participé à plusieurs expéditions meurtrières dans le secteur. Au premier rang de ceux qui l'accusent, figure

l'ex-conseiller du secteur Nyakabanda, Grégoire Nyirimanzi, condamné à 30 ans de prison, malgré ses aveux.

Inspirées des anciennes assemblées villageoises lors desquelles les sages réglaient les différends, assis sur le gazon, les gacacas (prononcer gatchatcha) sont chargées de juger les auteurs présumés du génocide perpétré contre les Tutsis en 1994, à l'exception des « planificateurs au niveau national » relevant de la compétence des tribunaux classiques.

Elles peuvent prononcer la réclusion criminelle à perpétuité, la peine la plus lourde au Rwanda.

Après avoir jugé plus d'un million de personnes, elles devraient terminer leurs travaux d'ici à la fin du mois, selon les prévisions officielles.

SRE/ER

© Agence Hirondelle