Le compromis laisse encore au moins sept ans aux Etats pour confirmer le tir de Kampala. Le texte actuel prévoit que la Cour pourra poursuivre les responsables d'agression si le Conseil de sécurité des Nations unies donne son feu-vert, ou si l'agresseur et l'état agressés sont parties à la Cour et ont, de plus, accepté sa compétence sur ce crime. Puisque adopté par traité, à Rome, en juillet 1998, tout amendement au statut de la Cour doit être ensuite accepté par chacun des Etats membres, le plus souvent par le biais des parlements nationaux. Une procédure longue et compliquée, qui signifie d'ores et déjà qu'il faudra encore plusieurs années, voire décennies, avant que la Cour ne puisse effectivement être compétente pour poursuivre les responsables d'agression.
Les 10 jours de conférence ont souligné les intérêts divergents des Etats, qui tous se retrouvent cependant sur leur volonté de maîtriser les initiatives de cette justice globale, symbole d'une perte de souveraineté grandissante. Ainsi, qu'ils soient parties à la Cour ou simplement invités à participer à ses débats, les camps se sont clairement affichés. Les cinq puissances ont notamment bataillé pour placer sous le contrôle du Conseil de sécurité des Nations unies les poursuites pour « agression ». De leur coté, plusieurs pays africains et latino-américains notamment, souhaitaient, grâce à l'agression, que les grandes puissances aient à répondre de leurs crimes.
Car la Cour est vertement critiquée, d'abord parce qu'elle n'enquête aujourd'hui que sur le continent africain et notamment en Ouganda, en République démocratique du Congo, en Centrafrique, au Darfour et au Kenya. Ensuite, parce que pour beaucoup les crimes qui menacent le plus ouvertement « la sécurité internationale » restent impunis, comme en Irak, dans les territoires palestiniens, ou encore en Afghanistan.
La conférence de Kampala a aussi permis d'amender l'article sur les crimes de guerre, en ajoutant aux armes interdites les gaz toxiques, les armes empoisonnées et certains types de balles. Mais il a fallu au négociateur belge, à l'origine de cette proposition, accepter quelques compromis, à la demande notamment du Royaume Uni et de la France, dont les forces de police utilisent ce type d'armes lors d'interventions ou dans la lutte contre la piraterie dans l'océan indien.
Si les débats sur l'agression sont loin d'être clos, les Etats sont en revanche parvenus à une certaine unanimité sur les principes, en adoptant « la déclaration de Kampala », qui réaffirme leur engagement politique et diplomatique. Par ailleurs, 37 des 111 Etats ont « promis », calendrier à l'appui, de prendre des engagements déterminés en passant des accords pour l'exécution des peines, la protection des témoins ou encore pour adopter au niveau interne les lois d'adaptation à la Cour pénale internationale.
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