Le parquet espagnol a demandé jeudi l'ouverture d'une enquête sur les tortures subies par un syndicaliste pendant la dictature franquiste à Barcelone, en s'appuyant sur une loi phare du gouvernement de gauche entrée en vigueur il y a un an.
Cette prise de position du parquet pourrait créer un précédent alors que les victimes de la dictature franquiste (1939-1975) ont, jusqu'à récemment, vu toutes leurs plaintes rejetées au nom d'une loi d'amnistie, adoptée en 1977 lors de la transition vers la démocratie, et de la prescription des faits.
La semaine dernière, les victimes avaient déjà célébré une première victoire, l'une d'entre elles étant devenue la première à être entendue par un juge depuis la mort de Franco, quelques mois après l'admission de sa plainte.
Jeudi, le parquet de Barcelone a défendu pour sa part "l'admission d'une plainte pour crimes contre l'humanité et tortures", en lien avec "l'unité spécialisée dans les droits de l'homme et la mémoire démocratique" du parquet général, a indiqué le ministère public dans un communiqué.
"Jusqu'à maintenant, le parquet ne s'était jamais prononcé en ce sens", a salué l'ONG Amnesty International sur X (ex-Twitter).
Cette plainte avait été déposée en novembre par un responsable syndical qui assure avoir été détenu et torturé dans un commissariat de police de Barcelone au début des années 1970 afin de livrer des informations sur ses activités.
Le parquet de Barcelone justifie sa demande d'ouverture d'une enquête par le nouveau cadre pénal en vigueur en Espagne depuis l'approbation en octobre 2022 de la loi sur la mémoire démocratique.
Ce texte impose désormais à la justice "d'enquêter sur les violations" présumées "des droits de l'homme" survenues "pendant la Guerre civile et durant la dictature", rappelle le parquet dans son communiqué.
Pour cette raison, il juge nécessaire l'ouverture d'une enquête "sur les faits" dénoncé par le plaignant ainsi que sur "leur contexte", précise-t-il.
Si cette demande du parquet est acceptée, cette plainte suivra les traces de celle déposée par Julio Pacheco Yepes, retraité de 67 ans devenu vendredi dernier la première victime de torture de la dictature à témoigner devant un juge depuis la mort de Franco en 1975.
La plainte de cet ancien membre d'une organisation étudiante antifranquiste avait été admise en mai par un juge d'instruction de Madrid, mais sans le soutien du parquet espagnol.
Le vote de la loi sur la mémoire démocratique a été accueillie avec soulagement par les victimes du franquisme, qui espèrent qu'elle puisse ouvrir la voie à un examen des violations des droits de l'homme commis sous le régime franquiste.
Amnesty international espère que ces deux plaintes "créent un précédent et qu'elles soient les premières de plusieurs".
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