24.06.10 - TPIR/KAREMERA - LE PROCES MRND DE NOUVEAU REPORTE APRES DEUX SEMAINES DE SUSPENSION

Arusha, 24 juin 2010 (FH) - Le procès des anciens dirigeants du MRND devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), paralysé depuis plus de deux semaines par un bras de fer entre la chambre et l'un des avocats de la défense, a été reporté jeudi d'une journée.

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Les derniers développements de cette épreuve de force laissent même planer l'incertitude sur l'audience de vendredi.

Jeudi matin, les juges ne se sont même pas présentés au prétoire, chargeant le coordinateur de la chambre, Constant Hometomu, d'annoncer l'ajournement suite au mauvais état de santé de Mathieu Ngirumpatse, ancien président du MRND.

En l'absence des « honorables », aucune partie n'a jugé utile de s'exprimer.

Cependant, celui que la chambre considère depuis le 7 juin comme le premier responsable de cet enlisement, Me Peter Robinson, a confié à l'agence Hirondelle qu'il ne poserait aucun acte vendredi, dans le cadre de sa mission, avant d'être fixé sur deux requêtes. Ces deux demandes sont liées aux poursuites rwandaises contre Peter Erlinder, un autre avocat de la défense au TPIR.

Au lendemain de l'arrestation de Me Erlinder, accusé par Kigali de nier le génocide des Tutsis de 1994, Me Robinson, qui défend Joseph Nzirorera, l'ex-secrétaire général du MRND, avait demandé au greffe à se retirer pour des raisons personnelles et professionnelles.

Le défenseur disait craindre d'être lui-même inculpé par la justice rwandaise à cause de son travail au TPIR. Joignant l'acte à la parole, il avait refusé d'interroger un témoin qu'il avait lui-même fait venir des Etats-Unis aux frais du tribunal.

Indignés, le juge président Dennis Byron et ses collègues avaient annoncé l'ouverture d'une procédure pour « outrage au tribunal ».

Deux jours plus tard, le greffier en chef du tribunal, Adama Dieng, premier responsable de l'assistance judiciaire au TPIR, avait rejeté la demande de démission de Me Robinson, après avoir été assuré par Kigali que les poursuites engagées contre Me Erlinder n'étaient pas liées à ses activités au tribunal international.

Une semaine plus tard, l'administration du tribunal revient sur sa décision, affirmant s'être finalement rendue compte que certaines allégations contre l'avocat américain, telles que reprises dans le procès-verbal d'une audience devant un tribunal rwandais, faisaient des références spécifiques à ses déclarations devant le TPIR.

Sur conseil du secrétariat général de l'ONU, M. Dieng fait alors valoir, dans une note verbale datée du 15 juin, l'immunité de l'avocat et exige sa libération immédiate.

Réitérant ses assurances, le Procureur général du Rwanda, Martin Ngoga, explique que le procès-verbal de l'audience devant le tribunal de grande instance de Gasabo est entaché d'erreurs.

Le 17 juin, la Haute Cour siégeant à Kigali décide de libérer provisoirement Erlinder mais uniquement « pour des raisons de santé ».

Aujourd'hui, le cheval de bataille du défenseur de Nzirorera n'est autre que cette note verbale du greffier, qu'il oppose aux juges en leur demandant de reconsidérer leur décision de le poursuivre pour outrage. Il estime par ailleurs que le tribunal doit aller jusqu'au bout, refuser de se contenter de la libération de Peter Erlinder pour « des raisons de santé » et exiger, au nom de l'immunité, de l'abandon des poursuites.

La presque totalité des avocats au TPIR le soutiennent dans ce combat. Mais certains ne sont pas d'accord avec lui sur les moyens d'action. Ceux-là estiment encore possible de se battre pour la reconnaissance de leur immunité sans abandonner leurs clients.

Cette péripétie, qui ne sera certainement pas la dernière de « ce procès à problèmes », intervient alors que le plus célèbre détenu du tribunal, le colonel Théoneste Bagosora, dont l'audition avait été plusieurs fois reportée, suite à l'indisponibilité de son avocat, est enfin prêt à témoigner pour la défense de Nzirorera.

Si Me Robinson se contente mardi de le saluer et de le remercier courtoisement sans lui poser la moindre question, comme il l'avait fait pour le dernier témoin, la chambre perdra d'autres précieux jours d'audience.

ER/GF

© Agence Hirondelle