« Si Taylor pense qu'il peut donner des ordres à la Cour il se trompe » a rétorqué le juge Richard Lussik. De son côté, la procureure, Brenda Hollis, a simplement demandé que l'accusé ne soit pas autorisé à quitter la salle d'audience. « Il n'assiste pas à un événement mondain. Il n'est pas un VIP. Il est dans une cour criminelle ». L'accusé a été obligé de rester dans le prétoire, mais a refusé de se revenir devant la cour dès la première suspension.
Le procureur a poursuivi son réquisitoire. Plaidant avec force, Brenda Hollis a estimé que « sans le courage et l'implication des témoins, ce procès n'aurait pas eu lieu ». La procureure américaine a évoqué les victimes: « Ceux qui parlent pour les morts, ceux qui ont été réduits à l'esclavage. Sans eux, la Cour n'aurait pas existé. Les victimes sont reconnaissantes aux Nations unies et au Secrétaire général, à Kofi Annan, qui n'a pas permis l'impunité ».
Pour Brenda Hollis, le premier chef d'Etat africain poursuivi devant la justice internationale est un homme « intelligent, charismatique, manipulateur », qui a « conduit les crimes à travers ses intermédiaires », les rebelles du Front révolutionnaire uni (RUF) qui signaient leurs forfaits en coupant les mains et les bras de leurs victimes. « Monsieur Taylor est devant vous parce qu'à travers sa volonté, ses ordres, ses omissions, ces crimes ont été commis ». Pour l'accusation, Charles Taylor a conduit une « campagne de terreur », avec l'aide de ses alliés en Libye et au Burkina Faso. Pour Brenda Hollis, « il n'y a pas de doute, il est coupable ».
L'ancien président du Liberia est accusé de crimes contre l'humanité et crimes de guerre pour avoir soutenu les rebelles sierra-léonais du Front révolutionnaire uni (RUF) dans l'objectif de piller les richesses diamantifères du pays. La guerre civile (1991-2002) avait fait 150 000 morts et plusieurs dizaines de milliers d'amputés.
Charles Taylor avait été inculpé en 2003 et arrêté en 2006, au Nigéria. Il avait ensuite été transféré à La Haye, aux Pays-Bas, pour des raisons de sécurité. La présidente du Libéria, Ellen Johnson-Sirleaf, avait estimé que sa présence dans la région constituait un danger.
Créé en 2002 au terme d'un accord entre les Nations unies et le gouvernement de Freetown, le TSSL ne prévoit ni la perpétuité, ni la peine capitale. En huit ans, le tribunal a jugé et condamnés huit responsables de la guerre civile, à des peines de 15 à 52 ans de prison.
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