19.10.11 - BELGIQUE/HABRE - LES VICTIMES TCHADIENNES EN FAVEUR D'UN PROCES EN BELGIQUE

Bruxelles, 19 octobre 2011 (FH) - Les victimes ayant déposé plainte contre l'ancien dictateur tchadien Hissène Habré, que le Rwanda se propose de juger, s'impatientent et certaines commencent à quitter ce monde, selon leurs avocats.

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« Est-ce vraiment sérieux ? », s'interroge Clément Abaïfouta, président de l'Association des victimes des crimes et répressions politiques au Tchad, joint par l'agence Hirondelle à N'Djamena, depuis Bruxelles. « Le Sénégal nous a déjà tournés en bourrique pendant 21 ans. En tant que victime, cela m'écoeure. Les victimes qui ont survécu vieillissent, trois sont encore mortes récemment sans avoir vu de procès. Je voudrais que les gens nous respectent », dit-il.

Quant à Maître Jacqueline Moudeïra, avocate des victimes, elle doute que le Rwanda puisse supporter les coûts financiers du procès. « Le Rwanda dispose-t-il des fonds nécessaires pour traiter ce genre d'affaires coûteuses ? Et sinon, qui va les fournir ? », demande l'avocate tchadienne. « De plus, il n'y a aucune plainte déposée par des victimes au Rwanda, comme c'est le cas en Belgique", poursuit- elle, tout en exigeant, elle aussi, « que l'on respecte les victimes qui attendent un procès depuis longtemps ».

Selon eux, la justice belge, qui a instruit une plainte déposée devant elle en 2001 par des Belges d'origine tchadienne, reste la meilleure solution pour garantir la tenue d'un procès équitable. "La justice belge est compétente en vertu de sa loi de compétence universelle, elle a lancé un mandat d'arrêt international et elle est prête après cinq ans d'instruction", assure Mme Moudeïra.

Mais, déplore-t-elle, le Sénégal, où réside Hissène Habré, ne "répond pas" aux requêtes d'extradition de la Belgique. En juillet dernier, après que le Sénégal annulait le renvoi, un temps envisagé de Habré vers le Tchad, le porte-parole du ministère belge des Affaires étrangères avait de nouveau officiellement demandé "l'extradition vers Bruxelles".

Contacté lundi, le ministère a confirmé à l'agence Hirondelle le maintien de cette position, sans vouloir commenter les déclarations des autorités rwandaises. Les représentants des victimes craignent avant tout le "facteur-temps", selon Jacqueline Moudeïra. « Bien que le Rwanda n'ait pas encore été saisi officiellement par l'Union africaine, nous demandons, si cela arrivait, que le jour même un accord écrit soit rédigé avec une date de procès dans un délai raisonnable - c'est-à-dire, pas dans cinq ans... "   

Selon une source proche du dossier, l'Union africaine (UA) « souhaite avant tout trouver une solution en Afrique ».  Tant Jacqueline Moudeïra que Clément Abaïtoufa fustigent des présidents africains membres de l'UA qui ne veulent pas "qu'un de leurs pairs soit jugé par des "petits Blancs". "L'honneur de l'Afrique, etc. D'accord... Mais qu'ont-ils fait ces Africains jusque-là ? Rien. La bonne justice n'a pas de couleur", conclut M. Abaïfouta.   

BF/ER/GF

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