23.01.12 - CPI/KENYA - LA CPI RENVOIE DEUX CANDIDATS A LA PRESIDENTIELLE EN PROCES

La Haye, 23 janvier 2012 (FH) - Quatre des six suspects poursuivis pour crimes contre l'humanité commis au Kenya suite à la présidentielle de décembre 2007 ont été renvoyés en procès par les juges de la Cour pénale internationale (CPI). Dans une décision rendue lundi matin, les magistrats ont estimé que le procureur avait présenté les preuves suffisantes pour confirmer les charges contre le vice-premier ministre et ministre des Finances, Uhuru Kenyatta, le directeur de Cabinet de la présidence, Francis Muthaura, le député William Ruto et le journaliste Joshua Sang. Kenyatta et Ruto sont des candidats déclarés à l'élection présidentielle de 2013.

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Les juges ont en revanche prononcé le « non-lieu » dans le cas de l'ancien ministre de l'Industrie, Henry Kosgey, faute de preuves suffisantes, ainsi que dans celui de l'ancien chef de la police, le général Hussein Ali. Les magistrats de La Haye ont estimé que le procureur n'avait pas apporté de preuve suffisantes.

Les juges n'ont pas ordonné l'arrestation des quatre accusés, mais ont en substance rappelé que des mandats d'arrêt pourraient être délivrés s'ils entravaient le cours de la justice. « La chambre rappelle ces avertissement précédents », selon lesquels ils ne pourront bénéficier de la liberté que s'ils ne s'engagent pas dans « l'incitation à la violence ou à la haine ».

La présidente de la chambre, Ekaterina Trendafilova a réaffirmé le désir des juges "que les décisions délivrées par la chambre aujourd'hui apportent la paix au peuple de la République du Kenya et préviennent toute sorte d'hostilité ». Elle a ajouté que les accusés devaient être considérés comme innocents tant que la preuve d eleur culpabilité n'aura pas été apportée.

William Ruto devra dire, dans les prochaines semaines, s'il plaide coupable ou non coupable des charges retenues contre lui. Les juges décideront alors de la date du procès, qu'il subira aux côtés du journaliste Joshua Sang, lui aussi mis en accusation. Les deux hommes sont proches du Mouvement démocratique orange (MDO) de l'actuel premier ministre Raila Odinga.

La seconde affaire rassemblera Uhuru Kenyatta et Francis Muthaura dans le box des accusés. Ils sont pour leur part proches du Parti de l'unité nationale du président Mwai Kibaki, réélu lors de l'élection contestée de 2007 mais qui ne peut pas se représenter.

Pour les juges, les crimes orchestrés par William Ruto entre le 30 décembre 2007 et fin janvier 2008, dans la région d'Eldoret notamment, font partie « d'une attaque indirecte »  perpétrée contre les Kikuyu, les Kamba, les Kisii, « en raison de leur affiliation politique présumée au Parti national unifié » . Considéré comme co-auteur indirect de cette attaque, William Ruto aurait orchestré les violences qui avaient suivi le scrutin dont était sorti vainqueur le président sortant, Mwai Kibaki.

Selon les juges, en réponse aux violences, Uhuru Kenyatta et Francis Muthaura auraient « pris le contrôle des Mungiki », un gang criminel, pour leur ordonner de commettre des attaques. Il y a des « motifs sérieux de croire qu'entre le 24 et le 28 janvier 2008, une attaque a été conduite contre les civils résidant à Nakuru et Naivasha, considéré comme des supporters du Mouvement démocratique orange, en particulier ceux appartenant aux groupes ethniques Luo, Luhya et Kalenjin » écrivent les juges.

Dans un communiqué, le directeur exécutif de la branche kényane de la Commission internationale des juristes, George Kegoro, a demandé au chef de l'Etat, Mwai Kibaki et au premier ministre, Raila Odinga, de suspendre Uhuru Kenyatta et Francis Muthaura de leurs fonctions actuelles.

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