17.04.12 - RWANDA/JUSTICE - APPEL DE MUGESERA CONTRE L'USAGE DU KINYARWANDA DANS SON PROCES

Kigali, 17 avril 2012 (FH) – Léon Mugesera, l’universitaire et ancien homme politique rwandais accusé de crimes de génocide, notamment pour un discours prononcé en 1992 dans le nord de son pays, a fait appel de la décision de son juge, de conduire la procédure en kinyarwanda, apprend-on mardi.

1 min 50Temps de lecture approximatif

Ce linguiste, qui a longtemps enseigné à l’Université nationale du Rwanda (UNR), a été extradé du Canada en janvier, après une longue bataille judiciaire.

Le 3 avril, le juge Sauda Murererehe du Tribunal de grande instance de Nyarugenge, dans la ville de Kigali, avait rejeté une demande de l’accusé qui voulait que toute la procédure, depuis l’interrogatoire par le parquet jusqu’au procès, se déroule en langue française.

Selon le quotidien privé rwandais The New Times, l’appel de Mugesera devait être entendu lundi par la Haute cour. Mais la défense ayant obtenu un report d’une semaine pour pouvoir lire les arguments de l’accusation contre son appel, l’audience a été reportée au 23 avril.

L’ouverture du procès est attendue le 9 mai, devant le Tribunal de grande instance de Nyarugenge.

Le procès n’avait pas pu débuter le 2 février, suite à une requête de l’accusé qui ne s’estimait pas valablement défendu. Il avait alors demandé et obtenu un délai de deux mois pour étoffer son équipe de défense. Cette dernière ne comprenait alors qu’un avocat, Maître Donat Mutunzi, du barreau de Kigali, alors que, selon l’accusé, l’affaire devrait mobiliser en tout six défenseurs canadiens, deux Rwandais et un Américain. Le 2 avril, c’est seulement en compagnie de Me Mutunzi que Mugesera s’était présenté devant la juge Sauda Murererehe. Il avait demandé un nouveau report d’un mois pour compléter son équipe. Le lendemain, la juge lui accordait ce délai supplémentaire mais décidait que les débats se dérouleraient en kinyarwanda, faisant ainsi droit à une requête de l’accusation. L’accusé avait fait valoir qu’il venait de passer près de 20 ans dans un pays non-rwandophone et qu’il ne connaissait pas la terminologie juridique en langue rwandaise. Suivant le raisonnement de la partie adverse, la juge avait tranché que Mugesera connaissait bien le kinyarwanda, sa langue maternelle dans laquelle il avait prononcé le discours incriminé. A l’époque du discours, il était vice-président pour la préfecture de Gisenyi (nord) du parti de l’ex-chef de l’Etat Juvénal Habyarimana dont l’assassinat, dans la soirée du 6 avril 1994, avait déclenché le génocide. Dans sa célèbre intervention, l’orateur avait appelé les Hutus à renvoyer les Tutsis « chez eux en Ethiopie », en les faisant passer par la rivière Nyabarongo, dans laquelle des Tutsi furent jetés vifs ou morts deux ans plus tard. ER/GF