11.05.12 - TSSL/TAYLOR - LA DEFENSE DE TAYLOR S’OPPOSE A LA PERPETUITE

La Haye, 11 mai 2012 (FH) – Les avocats de Charles Taylor estiment, dans un mémoire écrit déposé jeudi devant le Tribunal spécial pour la Sierra Leone, que la sentence de 80 ans requise par le procureur est « manifestement disproportionnée et excessive ».

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Cette peine a été demandée par l'accusation dans ses conclusions écrites, et une audience sur la sentenceest attendue mercredi prochain.

Pour les avocats de l'ancien président du Libéria, la sentence à infliger à Charles Taylor ne devrait pas êtreéquivalente à une peine de perpétuité.

Ils ajoutent que le procureur ne fait que relayer la demande de l’ancienne ambassadrice américaine au Libéria, qui, dans un câble adressé à Washington, et révélé par Wikileaks, avait demandé que Charles Taylor soir« tenu éloigné [du Libéria] pour longtemps ».

Dans leur mémoire, maîtres Courtenay Griffiths et Terry Munyard estiment que blâmer M. Taylor « pour l’ensemble du conflit sierra-léonais pourrait apaiser la conscience des Sierra-léonais qui ont eux-mêmes commis des atrocités, mais cela ne contribuera pas, en fin de compte, à la paix et la réconciliation dans la sous-région ».

L’ancien président du Libéria a été reconnu coupable, le 26 avril, de crimes contre l’humanité et crimes de guerre commis en Sierra Léone entre 1996 et 2002. Les juges ont reconnu qu’il avait soutenu, armé et financé les rebelles du Front révolutionnaire uni (RUF) durant la guerre civile (1989/2002) mais ont estimé qu’il ne les contrôlait pas.

Parmi les circonstances atténuantes, ses avocats estiment que devraient notamment être pris en compte sa contribution au processus de paix en Sierra Léone, sa démission volontaire et son départ du Libéria en 2003, sacompassion pour les victimes, exprimée au cours du procès et renforcée par sa conversion au judaïsme.

Les avocats ajoutent que Charles Taylor a 64 ans et est père de 15 enfants, dont l’un est né alors qu’il était détenu depuis trois ans aux Pays-Bas. La prison de La Haye permet en effet aux détenus de rencontrer leurs épouses dans une chambre conjugale.

Sur les conditions de sa démission de la présidence du Libéria, le 11 août 2003, les avocats affirment  que Charles Taylor a quitté le pays pour ne pas alimenter les hostilités, alors qu’il était menacé par les rebelles du LURD, soutenus par la Guinée et les Etats-Unis, et ceux du MODEL, soutenus par la Côte d’Ivoire. Mouammar Kadhafi s’est battu jusqu’à la mort, et Bachar Al Assad s’accroche au pouvoir en Syrie, rappellent-ils encore. Rien de cela pour M. Taylor qui, en quittant le pouvoir, « a sauvé le Liberia, et par extension, la sous-région d’un nouveau bain de sang ».Charles Taylor devra purger sa peine au Royaume Uni. Au terme d’un accord passé en 2006, les autorités néerlandaises avaient accepté que le procès se tienne sur leur sol, à la condition qu’une fois condamné, le détenuserve sa peine dans un autre pays. Les avocats estiment que cet exil forcé au Royaume Uni constitue un préjudice pour l’accusé, qui sera transféré dans « un autre monde », loin du continent africain.

Enfin, la défense estime que les juges doivent déduire de la peine les 8 ans et 8 mois passés, selon eux, en détention. Charles Taylor avait été arrêté dans le nord du Nigéria, le 29 mars 2006, il y a un peu plus de 6ans, mais ses avocats estiment que les années passées en exil à Calabar, au Nigéria, au terme d’un accord négocié avec le président d’alors, Olusegun Obasanjo, étaient de facto une résidence surveillée. Charles Taylor ne pouvait pas se déplacer librement, ni conduire des activités politiques rappellent-ils.

Les audiences pour débattre de la sentence se tiendront le 16 mai. La peine devrait être prononcée le 30 mai.

SM/ER