La création d'un tribunal spécial pour juger l'invasion russe de l'Ukraine est un "pas positif", mais l'immunité prévue pour les trois plus hauts dirigeants russes en fonction, dont Vladimir Poutine, n'a "aucun sens", a déploré mardi une responsable d'Amnesty International.
Le tribunal, dont la création a été annoncée le 9 mai à Lviv par l'Ukraine et ses alliés européens, n'a pas publié ses statuts, mais "nous savons qu'ils envisagent l'immunité pour la troïka (chef de l'Etat, chef du gouvernement et chef de la diplomatie, ndlr), ce qui ne fait aucun sens", a déclaré à l'AFP Veronika Velch, directrice Ukraine d'Amnesty international, de passage à Paris.
"Donc, vous ne pouvez poursuivre ni Poutine ni (Sergueï) Lavrov, ni le Premier ministre tant qu'ils sont en fonction", a-t-elle poursuivi, relevant que le président russe pouvait encore rester des années au pouvoir.
Le tribunal, établi par le Conseil de l'Europe et l'Ukraine, aura pour objectif de juger le "crime d'agression", ce que ne peut faire la Cour pénale internationale (CPI).
Si les détails de son fonctionnement et son statut n'ont pas été rendus publics, le Conseil de l'Europe rappelle sur son site "l'immunité personnelle" dont bénéficient les membres des "troïkas" jusqu'à ce qu'ils ne soient plus au pouvoir ou si leur immunité a été levée.
Le crime d'"agression" est défini par le recours à la forme armée contre la souveraineté et l'intégrité d'un pays.
Selon Mme Velch, "entre 35 et 40 personnes" pourraient être poursuivies, "essentiellement des militaires mais aussi des hommes politiques" devant ce tribunal, qui devrait être créé à la fin de l'année.
Mme Velch a cependant salué comme un pas "positif" la création d'un tribunal spécial "sans précédent depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale". La notion de crime d'agression a été mise en place au procès de Nuremberg contre des dignitaires nazis en 1945.