L'obsession du président américain Donald Trump pour un prétendu "génocide" de fermiers blancs en Afrique du Sud, dont il a répété mercredi face à son homologue sud-africain Cyril Ramaphosa qu'ils étaient des "milliers" tués, déforme un phénomène très marginal dans ce pays affichant l'un des taux d'homicide les plus élevés de la planète.
Ces cas représentent une infime minorité des homicides en Afrique du Sud: le groupe identitaire afrikaner AfriForum, proche de la sphère trumpiste et à l'origine d'une campagne pour mettre la lumière sur le phénomène, a lui-même recensé 49 meurtres de fermiers, sans distinction d'appartenance ethnique, en 2023. Soit une part extrêmement mineure des 27.621 meurtres recensés au total entre avril 2023 et mars 2024 par la police sud-africaine.
L'écrasante majorité des meurtres ont lieu dans des zones urbaines habitées par des populations noires, la démographie spatiale du pays étant encore largement marquée par les séquelles de la colonisation et l'apartheid.
Les dernières statistiques de la police s'agissant des meurtres sur terrain agricole, exploitation, parcelle ou petite propriété pour l'année 2024 dénombrent 436 homicides ainsi que 331 tentatives d'homicide, toujours sans distinction d'appartenance ethnique.
Mais cela englobe bien plus que ceux ayant seulement visé des fermiers blancs, car la plupart des ouvriers agricoles sont des travailleurs noirs.
Il y avait par exemple 2,2 millions de foyers noirs vivant de l'agriculture en 2022, selon l'institut national de statistiques StatsSA, contre seulement environ 127.000 foyers blancs vivant de la terre.
La minorité blanche possédait 72% des terres agricoles en 2017, selon des chiffres du gouvernement. Alors qu'elle ne représente que 7,3% des 62 millions d'habitants en Afrique du Sud, selon le recensement de 2022.
Les 59 personnes accueillies aux États-Unis en tant que réfugiés, d'après les derniers chiffres de l'ambassade américaine à Pretoria, représentent donc une infime part de ces quelques 4,5 millions de Blancs sud-africains.
"Il y a des centaines de personnes et même des milliers qui veulent venir dans notre pays", a assuré Donald Trump mercredi face au président sud-africain Cyril Ramaphosa.
Interrogé sur le nombre de demandes reçues par Washington, un porte-parole du département d'État américain a simplement répondu lundi à l'AFP que son ambassade à Pretoria "continu(ait) d'examiner les demandes des personnes qui lui ont fait part de leur intérêt pour une réinstallation aux États-Unis", sans donner de chiffres.
La Chambre de commerce sud-africaine aux États-Unis, qui avait mis en place une plate-forme d'enregistrement en ligne pour transmettre des informations, a dit en mars avoir reçu des demandes pour 67.042 Sud-Africains souhaitant s'installer outre-Atlantique.
Son président Neil Diamond a toutefois observé qu'un effet d'aubaine n'était pas à exclure: "Ce n'est pas facile pour un Sud-Africain d'émigrer, et surtout vers les États-Unis", avait-il déclaré à l'AFP en février.