06.09.13 - CPI/KENYA - PREMIER PAS VERS LE RETRAIT DU KENYA DU STATUT DE ROME

Arusha, 06 septembre 2013 (FH) – Un pas crucial a été franchi jeudi vers le retrait du Kenya du Statut de Rome créant la Cour pénale internationale (CPI).

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Sans aucune surprise, la Chambre des députés, rappelée pour une session extraordinaire, a voté cette rupture, désavouant ainsi les poursuites engagées par la CPI contre les deux plus hauts responsables du pays. Elus dès le premier tour en mars dernier, le président Uhuru Kenyatta et le vice-président William Ruto répondent de crimes contre l’humanité perpétrés lors des violences post-électorales de 2007-2008. La CPI poursuit également le journaliste Joshua Sang, qui doit comparaître à partir de mardi prochain aux côtés de son vice-président. Quant au procès de Kenyatta, il démarrera le 12 novembre. La CPI a rappelé plusieurs fois au cours des derniers jours que le retrait d’un Etat-partie ne peut, selon les dispositions du Statut de Rome, annuler ou influencer le cours des affaires ouvertes.

Au cours des vifs débats de jeudi, la Cour a été une nouvelle fois traitée d’instrument du néocolonialisme occidental. «Cette motion vise à libérer le Kenya et les Kényans de leurs maîtres colons», a déclaré l’initiateur de la motion, Aden Duale, chef de la majorité parlementaire. Abondant dans le même sens, un autre législateur de la majorité a appelé à « jeter » la CPI «dans les poubelles de l’Histoire». La minorité, dont une partie est sortie de l’hémicycle avant le vote, avait aussi tenté de batailler. Parmi ses ténors, Jakoyo Midiwo qui a qualifié le vote « de jour sombre pour le Kenya ». Sur un ton plus haut, un autre leader de la minorité, Francis Nyenze, a parlé de «plan diabolique ourdi » par la coalition au pouvoir.

Après cet acte sans précédent dans l’histoire de la Cour, la chambre des députés a annoncé le dépôt, dans les 30 jours, d’un « projet de loi portant abrogation de la Loi sur les crimes internationaux » adoptée en 2008. Ce texte fixait également les modalités de coopération entre la Kenya et la Cour internationale. L’Assemblée a enfin demandé « au gouvernement de prendre des mesures urgentes pour retirer le Kenya du Statut de Rome ».Le Sénat, également dominé par « la mouvance » Kenyatta-Ruto, se réunira mardi prochain pour examiner à son tour la même motion.

« Il n'est pas possible d'arrêter des procédures légales et judiciaires indépendantes par des mesures politiques », a commenté Fadi El Abdallah, le porte-parole de la CPI, dans une vidéo mise en ligne par la Cour. Le droit de se retirer est gravé dans l’article 127 du Statut de Rome. Mais, poursuit le texte, « le retrait prend effet un an après la date à laquelle la notification a été reçue, à moins que celle-ci ne prévoie une date postérieure ». Pour ce qui est de l’impact d’un éventuel retrait, le statut poursuit : « son retrait ne dégage pas l'État des obligations mises à sa charge par le présent Statut alors qu'il y était Partie, y compris les obligations financières encourues, et n'affecte  pas non plus la coopération établie avec la Cour à l'occasion des enquêtes et procédures pénales à l'égard desquelles l'État avait le devoir de coopérer et qui ont été commencées avant la date à laquelle le retrait a pris effet ». Enfin, «le retrait n'affecte en rien la poursuite de l'examen des affaires que la Cour avait déjà commencé à examiner avant la date à laquelle il a pris effet».

Si le divorce est consommé, le Kenya deviendrait le premier pays à claquer la porte de l’Assemblée des Etats-parties au statut de Rome en vigueur depuis juillet 2002.ER