07.10.13 - CPI/RUTO - L’INCENDIE DE L’EGLISE DE KIAMBAA AU CŒUR DU PROCES DU VICE-PRESIDENT KENYAN

Arusha, 7 octobre 2013 (FH) – Parmi les faits reprochés au vice-président kényan William Ruto et à l’animateur radio Joshua Sang, figure le massacre perpétré le 1er janvier 2008 à l’église de Kiambaa où de nombreuses personnes de la tribu kikuyu avaient cherché refuge.

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En procès depuis le 10 septembre, les deux hommes sont poursuivis devant la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes contre l’humanité commis dans leur pays lors des violences post-électorales de 2007- 2008. Ils répondant de meurtres, déportation ou déplacement forcé de population et persécution.Alors que la planète célébrait le Nouvel An, cette église rurale située au sud de la ville d’Eldoret, dans la Vallée du Rift, fut fermée de l’extérieur et incendiée. Selon le procureur de la CPI, entre 17 et 35 personnes furent brûlées vives. L’organisation américaine de défense des droits de l’Homme Human Rights Watch (HRW), une des premières à s’être rendue sur les lieux après le carnage, rapporte les propos d’un survivant. «J’ai vu mon neveu en flammes. Il criait, ‘Mon oncle, mon oncle !’ mais ensuite il est tombé le visage contre terre parce que le matelas imbibé d’essence était sur son dos et il est mort brûlé», raconte le rescapé.L’homme politique et l’animateur radio ne sont pas accusés d’avoir mis le feu à l’église. Le procureur reproche au vice-président kényan, qui était alors député d’Eldoret, d’avoir joué « une rôle majeur » dans la création et la direction du groupe ayant attaqué le lieu de culte. Pour la procureure Fatou Bensouda, Ruto a participé à l’organisation des activités criminelles de ce « réseau » composé de jeunes de sa tribu des Kalenjin. Pour la présidentielle de fin 2007, Ruto avait soutenu le candidat de l’opposition Raila Odinga, contre le président sortant Mwai Kibaki. Ce dernier appartient à la tribu kikuyu tandis qu’Odinga est de la tribu Luo. Pour le procureur de la CPI, Ruto voulait nettoyer la vallée du Rift de tout élément kikuyu, un projet dans lequel il aurait bénéficié du concours d’une émission populaire en langue vernaculaire animée par Joshua Sang, un autre fils de la tribu Kalenjin. Selon l’accusation, le journaliste de Kass FM, au faîte de la renommée, lançait des appels à la chasse aux Kikuyus avant les élections. Il aurait ainsi déclaré, un jour, sur les antennes de sa radio « si Kibaki gagne, nous ferons notre travail ». Par « travailler », il voulait dire, selon l’accusation, évincer, tuer les Kikuyus.Dans le cadre du « dessein criminel commun » avec le député Ruto, l’animateur radio aurait, par ailleurs, au cœur des massacres, plusieurs fois indiqué au « réseau » les endroits où se cachaient des Kikuyus. Sur l’ensemble du territoire kényan, les violences post-électorales de 2007-2008  ont fait plus d’un millier de morts et plus de 600 000 déplacés, dont certains n’ont toujours pas regagné leur domicile.Chrétiens pratiquants, les deux hommes protestent de leur innocence, affirmant notamment avoir des membres de famille mariés à des personnes de la tribu kikuyu. Le jour de l’ouverture du procès, le 10 septembre, Maître Karim Kahn l’avocat de Ruto avait qualifié le dossier du procureur «d'insulte à tous ceux qui croient en une institution viable ». Pour sa part, Joshua Sang, s’exprimant en personne, avait déclaré : «je suis un journaliste innocent. Je n'ai pas contribué aux violences au Kenya, mais à la paix».Il appartiendra au juge président Chile Eboe-Osuji et à ses deux collègues de la chambre, Olga Herrera Carbuccia, et Robert Fremr, de trancher.ER