Génocide rwandais: un chercheur réclame l'ouverture du "verrou" des archives de l'Elysée

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Une clé pour enfin ouvrir le "verrou" des archives: le chercheur François Graner a symboliquement déposé mercredi une grande clé en bois devant l'entrée de l'Institut François Mitterrand à Paris pour réclamer l'ouverture des archives de l'Elysée sur le génocide au Rwanda.

"Demain (jeudi), nous saisissons la Cour européenne des Droits de l'Homme (CEDH). C'est une manière démocratique et normale d'essayer de faire évoluer les choses", a annoncé à l'AFP ce chercheur en physique, auteur de plusieurs ouvrages sur le génocide de 1994 qui a fait, selon l'ONU, 800.000 morts, très majoritairement au sein de la minorité tutsi.

Accompagné de Thomas Borrel, membre de l'association Survie, François Graner s'est rendu mercredi matin à l'Institut François Mitterrand pour remettre symboliquement une clé d'un mètre environ à son administratrice Dominique Bertinotti "pour l'inviter à ouvrir enfin le verrou qui empêche aux chercheurs et aux journalistes d'accéder à des archives de la présidence de la République", ont-ils expliqué. Ils n'ont pas été reçus et ont déposé l'objet devant l'entrée, a constaté l'AFP.

En avril 2015, la présidence française avait officiellement annoncé la déclassification de ses archives sur le Rwanda pour la période 1990 à 1995, lorsque M. Mitterrand était à l'Elysée, un geste fort à l'occasion du 21e anniversaire du déclenchement du génocide rwandais, le 7 avril 1994.

Mais un article du code du patrimoine contesté par MM. Graner et Borrel protège les archives de chefs d'Etat pendant les 25 années suivant leur décès. Le 15 septembre, le Conseil constitutionnel avait jugé conforme à la constitution cette limitation de l'accès aux archives des anciens présidents, Premiers ministres et ministres.

François Graner n'a ainsi pas été autorisé à consulter celles du président Mitterrand, en exercice durant le génocide et décédé en 1996, alors que le Rwanda accuse depuis des années la France d'avoir abandonné aux massacres de nombreux civils de la minorité tutsi.

Dominique Bertinotti, mandataire des archives de François Mitterrand, avait émis un avis défavorable à la communication des documents demandés. Elle "n'a pas motivé, n'a pas justifié sa décision: c'est aussi une violation de mon droit, je vais le faire valoir devant la CEDH", a expliqué M. Graner.

"On espère que la CEDH échappera aux logiques politiciennes dans lequel s'est enferré le Conseil Constitutionnel, et qu'on aura une décision rendue sur le fond juridique et non pas une décision politique visant à protéger les gouvernants français de l'époque", a ajouté Thomas Borrel.