L'administration américaine avait prévenu qu'elle n'allait pas rester les bras croisés face à la "dictature" vénézuélienne de Nicolas Maduro. Mais comment réagira-t-elle après les élections du 20 mai, qualifiées d'"escroquerie" et de "mascarade" par le vice-président Mike Pence?
Des sanctions économiques à l'intervention militaire, l'AFP a interrogé plusieurs experts qui ont examiné les différentes options dont dispose Washington pour punir Caracas, qualifié en mars 2015 de "menace à la sécurité nationale".
- Sanctions renforcées -
Les Etats-Unis ont déjà sanctionné 60 responsables du gouvernement socialiste vénézuélien, dont Nicolas Maduro lui-même, les accusant de corruption et de complicité dans le trafic de drogue.
"Si Maduro gagne, comme attendu, le gouvernement américain va sûrement encore plus serrer la vis", avance David Smilde, analyste du centre WOLA sur les droits humains dans les Amériques, basé à Washington.
La semaine dernière, l'ambassadrice américaine aux Nations unies, Nikki Haley, a martelé qu'il était "temps de partir" pour le président socialiste, au pouvoir depuis 2013.
Pour ce faire, selon Mariano de Alba, un avocat vénézuélien spécialisé dans les affaires internationales, Washington risque de viser "les associés et les familles" des responsables gouvernementaux vénézuéliens.
D'autres poids lourds du régime, dont le numéro 2 Diosdado Cabello, risquent également d'être ciblés, analyse Jason Marczak, de l'institut américain Atlantic Council.
- Le précédent ConocoPhillips -
Même en cas de nouvelles sanctions, un embargo sur le pétrole semble peu probable à court terme, assure Mariano de Alba, en raison de l'affaire ConocoPhillips: la justice internationale a récemment condamné la société pétrolière d'Etat vénézuélienne PDVSA à verser quelque 2 milliards de dollars au groupe pétrolier américain, et la saisie de ses actifs a débuté.
Les autorités américaines attendent maintenant de voir comment la situation évolue pour imposer un éventuel embargo pétrolier qui risquerait d'aggraver une situation déjà affectée par la saisie des actifs de PDVSA.
Les Etats-Unis vont vouloir éviter "que des facteurs extérieurs exacerbent la crise humanitaire de grande ampleur qui existe déjà", explique Jason Marczak.
"L'affaire Conoco est déjà un énorme fardeau pour le gouvernement Maduro, parce que plus aucun pétrolier vénézuélien ne peut se rendre dans les eaux internationales sans craindre d'être saisi", ajoute-t-il.
Une analyse partagée par David Smilde, même si ce dernier n'exclut pas la possibilité de mesures intermédiaires, de moindre impact, contre le secteur pétrolier vénézuélien, comme des sanctions contre les compagnies qui assurent les pétroliers vénézuéliens.
- L'option militaire -
L'armée américaine peut-elle jouer un rôle dans le but, affiché par Washington, de "restaurer la démocratie" au Venezuela selon les termes du vice-président Mike Pence?
Le président Trump a affirmé l'été dernier qu'il n'allait pas "écarter une option militaire". Ce ton guerrier a été applaudi par des exilés vénézuéliens à Miami.
"Il y a un risque clair d'action militaire américaine", assure David Smilde. "Les expatriés vénézuéliens le réclament depuis longtemps, et il y a toujours des responsables politiques intéressés par l'option militaire".
Un avis tempéré par celui de Michael Shifter, président du groupe de réflexion Dialogue inter-américain à Washington, qui pense qu'"une intervention militaire américaine reste hautement improbable".
- La réalité des actes -
Le problème, pour Richard Feinberg de la Brookings Institution, est le manque de preuves sur l'existence au sein du gouvernement américain d'une "politique cohérente et applicable" sur le dossier vénézuélien.
"Je pense que la rhétorique de l'administration Trump sur le Venezuela, comme pour Cuba, cherche plus à plaire à leurs communautés respectives exilées qu'à obtenir des vrais résultats sur le terrain", ajoute-t-il.
Des actions plus concrètes passeraient par la mobilisation de la communauté internationale, et non par des actions unilatérales de Washington, explique enfin Victoria Gaytan, du think tank Global Americans.
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CONOCOPHILLIPS