04.09.2003 - TPIR/MILITAIRES I - DES MILITAIRES AURAIENT TUE ET JETE DES TUTSIS DANS DES LATRINES

Arusha, le 4 septembre 2003 (FH) - Un témoin du parquet a déclaré que des soldats ont exécuté et jeté des Tutsis dans des latrines en avril 1994, jeudi, dans le procès de quatre hauts gradés des ex-Forces armées rwandaises (FAR) en cours devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). Désigné par les lettres "DW" pour protéger son identité, le quatorzième témoin de l'accusation est une dame rescapée des massacres perpétrés en commune de Rubungo (province Kigali rural, centre du Rwanda) durant le génocide anti-tutsi de 1994.

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Le témoin a indiqué que le 8 avril 1994, des habitants de sa localité s'étaient déplacés vers un lieu-dit Karama, fuyant les tirs entendus depuis la nuit du 6 avril.

Des soldats du camp voisin de Kami sont venus à Karama et tué des Tutsis en se servant des grenades, a affirmé Mme DW. Ils ont jeté les corps dans des latrines D'une école attenante, a-t-elle ajouté.

Le témoin a indiqué avoir perdu trois soeurs lors de cette attaque. Certaines victimes ont été forcées de "de creuser leurs propres tombes", a dit le témoin.

Des femmes ont été enterrées avec leurs bébés, a ajouté Mme DW.

Selon le témoin, les militaires dénigraient leurs victimes en leur disant que "leur Dieu était mort". Ils faisaient ainsi allusion au président Habyarimana, qui avait trouvé la mort dans l'attentat du 6 avril. Le président Habyarimana était souvent critiqué dans les milieux extrémistes hutus pour sa politique jugée tolérante à l'égard des Tutsis.

A leur arrivée à Karama, les soldats auraient déclaré qu'ils allaient conduire les Tutsis "à Arusha", insinuant par-là qu'ils ne se sentaient plus liés par les accords de paix signés dans cette ville tanzanienne en août 1993 et qui prévoyaient le partage du pouvoir entre les Hutus et les Tutsis.

Le parquet affirme que les officiers supérieurs avaient autorité sur l'ensemble des hommes de troupe, y compris ceux qui n'appartenaient pas à leurs unités. l'accusation allègue également que certains officiers du haut commandement de l'armée étaient contre les accords D'Arusha. Ces derniers sont devenus caducs lors du déclenchement du génocide.

Ce procès dit "militaires I" concerne l'ancien directeur de cabinet au ministère de la défense, le colonel Théoneste Bagosora, considéré par le parquet comme "cerveau du génocide", l'ancien responsable des opérations militaires à l'Etat major de l'armée, le général de brigade Gratien Kabiligi, l'ancien commandant de la région militaire de Gisenyi (ouest du Rwanda), le lieutenant-colonel Anatole Nsengiyumva, ainsi que l'ancien commandant du bataillon para-commando de Kanombe (Kigali), le major Aloys Ntabakuze.

Ils sont accusés notamment de conspiration en vue du génocide, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre. Ils plaident non coupable.

Le procès se déroule devant la première chambre de première instance du TPIR, présidée par le juge norvégien Erik Mose, assisté des juges russe Serguei Aleckseievich et fidjien Jai Ram Reddy.

Les débats se poursuivront vendredi matin avec le contre-interrogatoire de Mme DW par les avocats de la défense.

GA/AT/GF/FH (Ml'0904B)