15.05.2003 - TPIR/SEMANZA - SEMANZA CONDAMNE A 24 ANS ET 6 MOIS DE PRISON

Arusha, le 15 mai 2003 (FH) - l'ancien maire de Bicumbi (province de Kigali rural, centre est du Rwanda), Laurent Semanza, a été condamné à un total de 25 ans de prison, jeudi par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). Laurent Semanza, 59 ans, a été reconnu coupable, à l'unanimité, de 5 chefs D'accusation (complicité à commettre le génocide et crimes contre l'humanité - viol, torture, assassinat et extermination), sur les 14 retenus contre lui, par la troisième chambre de première instance du TPIR présidée par le juge russe Yakov Ostrovsky.

2 min 45Temps de lecture approximatif

Les vingt-cinq ans de prison infligés à Semanza se divisent en plusieurs peines confondues et consécutives. Il a ainsi été condamné à 15 ans pour deux chefs (peines confondues), à 7 ans pour un chef - viol - et 10 ans pour deux chefs - torture et assassinat - peines confondues. Les peines maximales confondues (15 ans et 10 ans) sont applicables consécutivement, ce qui porte le total de la peine à 25 ans.

La chambre D'appel avait demandé une réduction de la peine de Semanza, au cas où il serait reconnu coupable, son arrestation et sa détention provisoire avant son transfert à Arusha ayant été entachées D'irrégularités. Les juges ont décidé que cette réduction serait de six mois. Laurent Semanza a donc été finalement condamné à 24 ans et 6 mois de prison.

Semanza a été déclaré non coupable à l'unanimité de sept chefs D'accusation, à savoir génocide, incitation directe et publique à commettre le génocide, crimes contre l'humanité (assassinat, persécution et viol - chefs D'accusation séparés), violation des conventions de Genève applicables en temps de guerre ( deux chefs D'accusation séparés).

La majorité des trois juges siégeant en première instance a également déclaré Semanza non coupable de crime contre l'humanité (extermination, chef D'accusation séparé), et de violation des conventions de Genève applicables en temps de guerre, mettant en minorité des avis dissidents exprimés par l'un ou l'autre juge.

Dans leurs délibérations, les juges ont conclu que Semanza a joué un rôle dans les massacres perpétrés à Bicumbi et Gikoro durant le génocide de 1994. Ils se sont notamment penchés sur quatre lieux allégués des massacres : les
églises de Ruhanga et de Musha, le secteur de Mwulire ainsi que la mosquée de Mabare.

Les juges ont estimé que même si l'accusé n'a pas personnellement pris part aux attaques des églises de Musha et de Ruhanga, ainsi que dans les collines de Mwulire, il a porté assistance à ceux qui ont perpétré les massacres.

Ils ont toutefois relevé que début avril 1994, Semanza est entré dans l'église de Musha où il a trouvé un nommé Rusanganwa. Il l'a assommé D'un coup de machette, blessure dont la victime a ensuite succombé.

La chambre a par ailleurs estimé que Semanza a incité au viol des femmes tutsies dans la commune Gikoro. Un discours de l'accusé prononcé à la foule le 13 avril 1994 s'est soldé par le viol D'une femme, et la mort D'une autre.

Dans son jugement, la chambre a trouvé que le nombre de morts à l'église de Musha et dans les collines de Mulire constitue "des circonstances aggravantes", soulignant l'influence qu'avait l'accusé vis à vis de sa communauté.

Les juges ont également retenu des circonstances atténuantes, notamment les travaux de développement que l'accusé avait initiés dans sa commune en tant que bourgmestre.

Ouvert sur le fond le 16 octobre 2000, le procès Semanza a été mis en délibéré le 19 juin 2002 devant la troisième chambre de première instance du TPIR, après que les parties eurent terminé la présentation de leurs moyens de preuve. Le parquet et la défense ont cité chacun vingt-sept témoins dans ce procès qui a duré dix-huit mois.

Semanza est défendu par l'avocat américano-camerounais, Me Charles Takou, assisté par un confrère béninois, Me Sadikou Alao. Le parquet était représenté par le Canado-Nigérian Chile Eboe-Osuji. l'accusé a plaidé non coupable.

Semanza a été arrêté au Cameroun en 1996 et transféré l'année suivante au centre de détention des Nations Unies à Arusha.

Outre le juge Ostrovsky, la chambre III saisie de l'affaire Semanza était composée des juges George Lloyd Williams de Saint-Kitts et Nevis et Pavel Dolenc de Slovénie.

GA/CE/GF/FH (SE'0515A)