20.01.2003 - TPIR/MEDIAS - NOUVELLE ALLEGATION DE SUBORNATION DE LA PART D’UN TEMOIN DE NGEZE

Arusha, le 20 janvier 2003 (FH) - Un témoin de la défense de Hassan Ngeze, un de trois accusés dans le procès des "médias de la haine", a allégué lundi que les enquêteurs du parquet du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) avaient tenté de le suborner. Désigné sous le pseudonyme "RM10" pour préserver son anonymat, le deuxième témoin de la défense de Hassan Ngeze a affirmé que des enquêteurs du parquet lui avaient promis au moins deux mille dollars américains et protection en échange d’un faux témoignage contre l'accusé.

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RM10 est le second témoin à décharge de Ngeze à évoquer une tentative de subornation de la part des enquêteurs du parquet. Le premier témoin de la défense, RM14, entendu la semaine dernière, a également déclaré qu'il avait été convaincu de fournir un témoignage erroné concernant les trois accusés dans le procès des médias.

Femme hutue mariée à un Tutsi, RM14 a déclaré avoir été torturée, violée et emprisonnée injustement au Rwanda entre 1997 et 2001. Acquitté finalement par un tribunal local, le témoin a fui son pays et réside jusqu'aujourD'hui à l'extérieur du Rwanda.

"Ils m'avaient promis de m'aider ou d’être détenue ici [à Arusha], où les détenus vivent dans de meilleures conditions qu'au Rwanda", a déclaré RM10 en parlant des enquêteurs du parquet. Le témoin a néanmoins indiqué que ces promesses ne se sont pas matérialisées.

Incriminer l'homme D'affaires Kabuga
Le témoin a également soutenu que les enquêteurs lui auraient demandé d’incriminer l'homme D'affaires Félicien Kabuga, activement recherché par le TPIR notamment sur le territoire kenyan.

En 1994, Félicien Kabuga était président du comité D'initiative de la RTLM et en était l'actionnaire principal. Il est accusé D'avoir financé la milice Interahamwe, considérée par le parquet comme le fer de lance du génocide. "On m'a demandé de dire des choses contre Ngeze et Kabuga. Qu'ils avaient travaillé ensemble pour amener des armes qui devaient être utilisées pour tuer des gens", a indiqué RM10.

Le témoin a déclaré ne pas connaître Félicien Kabuga, ajoutant que Hassan Ngeze n'était pas un assassin. En avril 1994, Ngeze se serait présenté à son domicile, pour le prévenir D'une attaque. "Si Ngeze avait été un assassin, il aurait tué mon mari ce jour-là", a dit RM10.

Hassan Ngeze était directeur et rédacteur en chef de la revue accusée D'extrémisme Kangura. Il est jugé conjointement avec deux anciens responsables présumés de la Radio-télévision libre des Mille collines (RTLM), Ferdinand Nahimana, et Jean-Bosco Barayagwiza. Ils sont poursuivis principalement pour utilisation de leurs médias respectifs à des fins de génocide. Ils plaident non coupables.

La représentante américaine du parquet, Simone Monasebian, a interrogé le témoin sur le contenu de Kangura et son impact sur les lecteurs mais a obtenu des réponses mitigées.

La défense de Ngeze s’est d’ailleurs plusieurs fois opposée à ce que le procureur pose de telles questions à un témoin illettré, expliquant qu'il n'était pas qualifié pour donner une opinion sur Kangura. Hassan Ngeze est défendu par l'avocat américain Me John Floyd et un confrère canadien Me René Martel.

Le procès se déroule devant la première chambre de première instance du TPIR présidée par la juge sud-africaine Navanethem Pillay et comprenant en outre les juges norvégien Erik Mose et sri-lankais Asoka de Zoysa Gunawardana.

AT/CE/GF/FH (ME'0120A )