02.09.2002 - TPIR/MILITAIRES - LE PROCES DES MILITAIRES A REPRIS LUNDI

Arusha, le 2 septembre, 2002 (FH)--Le procès de quatre hauts gradés des ex-Forces armées rwandaises (ex-FAR) a repris lundi devant le tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). Le parquet entend citer en premier comme témoin expert Alison des Forges, historienne américaine et activiste des droits de l'homme dont le rapport D'expertise doit être approuvé par la chambre.

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Conseiller principal pour la division Afrique de l'organisation internationale des droits de l'homme 'Human Rights Watch', Alison des Forges a publié plusieurs rapports et ouvrages sur la situation des droits de l'homme dans la région des Grands Lacs, notamment au Rwanda et au Burundi.

Elle a déclaré avoir effectué plus de trente séjours au Rwanda, où elle s'est rendue pour la première fois en 1967. En octobre 1993, elle a présidé une commission internationale D'enquête sur l'assassinat du président burundais Melchior Ndadaye.

Son livre sur le génocide rwandais de 1994, intitulé 'Aucun Témoin Ne Doit Survivre', a été primé aux Etats Unis comme une des meilleures publications de l'année 1999.

Pourtant, l'expertise D'Alison des Forges a été mise en cause par la défense, particulièrement ses connaissances en matière militaire. "Je suis compétente en tant qu'historienne capable de décrire des événements militaires et politiques, et pas en rapport avec des questions techniques
telles que l'armement", a réagi le témoin. La défense a par ailleurs suggéré que le témoin pourrait avoir une attitude biaisée, mettant en doute sa méthodologie de recherche.

La chambre devrait se prononcer mardi sur le statut D'expert D'Alison des Forges. Cette dernière a déjà déposé en cette qualité dans deux affaires devant le TPIR. Il s'agit du procès des "/medias de la haine," en cours devant la juridiction internationale, ainsi que de celui de l'ancien maire de Taba (province Gitarama, centre du Rwanda), Jean Paul Akayezu, dont le jugement a été rendu en 1998.

Le "procès des militaires" regroupe l'ancien directeur de cabinet au ministère de la défense, le colonel Théoneste Bagosora, l'ancien responsable des opérations militaires à l'Etat major de l'armée, le général de brigade Gratien Kabiligi, l'ancien commandant de la région militaire de Gisenyi (ouest du Rwanda), le lieutenant-colonel Anatole Nsengiyumva, ainsi que l'ancien commandant du bataillon para-commando de Kigali, le major Aloys Ntabakuze.

Ils sont notamment accusés D'entente en vue de commettre le génocide et de crimes de guerre. Le parquet allègue que les quatre hauts gradés des ex-FAR sont parmi les principaux responsables de la tragédie rwandaise qui a emporté la vie D'un million de personnes D'avril à juillet 1994. Ils plaident non coupables.

Selon le procureur, "Théoneste Bagosora était, en 1994, l'homme le plus puissant du pays", qui a "de facto" pris le contrôle des affaires politiques et militaires du Rwanda après l'attentat contre l'avion du président Juvénal Habyarimana le 6 avril. "Il s'est imposé comme l'homme de la situation à même de gérer la crise", selon le parquet.

Le procès des militaires est considéré comme l'un des plus importants que le TPIR ait jamais mené. Il s'était ouvert de façon symbolique le 2 avril dernier, puis ajourné le jour suivant après la déclaration liminaire du procureur, ce dernier n'ayant pas communiqué plusieurs pièces du dossier à la défense. Les accusés avaient pour leur part boycotté cette séance inaugurale, qualifiant ce manquement du procureur de violation du droit à un procès équitable. Les avocats avaient de leur côté parlé de "show médiatique", en réaction à l'impréparation du parquet.

Théoneste Bagosora, 61 ans, et Anatole Nsengiyumva, 52 ans, ont tous les deux été arrêtés au Cameroun, respectivement le 9 et le 26 mars 1996, et transférés à Arusha le 23 janvier 1997. Le premier est défendu par l'avocat français Me Raphaël Constant et le Canadien Me Jacques La Rochelle, et le second par des avocats kenyans, Me Kennedy Ogetto et Me Otachi Bw'Omwana.

Aloys Ntabakuze, 48 ans, et Gratien Kabiligi, 51 ans, ont été appréhendés au Kenya le 18 juillet 1997. Ntabakuze est défendu par l'avocat canadien Me André Tremblay. Son avocat principal, Me Clemente Monterosso du barreau du Quebec s'est retiré du dossier la semaine dernière. Kabiligi est quant à lui représenté par Me Jean Yaovi Degli des barreaux du Togo et de Paris, et Me Sylvia Olympia qui exerce en France.

Le parquet est représenté par l'Américaine Barbara Mulvaney. l'accusation entend citer à la barre quelque 250 témoins, dans une affaire qui devrait durer au moins deux ans.

Le procès des militaires se déroule devant la troisième chambre de première instance du TPIR, présidée par le juge George Lloyd Williams de Saint Kitts et Nevis, et composée en outre des juges, slovène, Pavel Dolenc, et sénégalaise, Andrésie Vaz.

GA/FH (ML-0902A)