14.08.2002 - TPIR/NIYITEGEKA - NIYITEGEKA AURAIT DIRIGE UNE ATTAQUE CONTRE DES TUTSIS A BISESERO

Arusha, le 14 août, 2002 (FH) - l'ancien ministre de l'information sous le gouvernement intérimaire, Eliézer Niyitegeka, aurait dirigé une attaque contre des Tutsis réfugiés sur une des collines de Bisesero (province Kibuye, ouest du Rwanda), a affirmé un témoin, mercredi, devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). Désigné par les lettres "GGY" pour protéger son anonymat, le quatrième témoin de l'accusation est un Tutsi rescapé du génocide en 1994.

2 min 24Temps de lecture approximatif

M.GGY a allégué que l'attaque à laquelle aurait participé Niyitegeka se serait déroulé "fin avril-début mai" 1994. Le témoin a affirmé que l'accusé portait une arme à feu.

Selon le témoin, Eliézer Niyitegeka, aurait dirigé cette attaque aux côtés D'autres personnalités locales dont la plupart ont été mises en accusation par le TPIR.

Il s'agit notamment de l'ex-maire de Gishyita Charles Sikubwabo et celui de Gisovu Aloys Ndimbati , tous les deux en fuite. Le témoin a également incriminé deux conseillers municipaux détenus à Arusha, Mika Muhimana et Vincent Rutaganira.

"Lorsque je l'ai vu[Eliézer Niyitegeka], il était en train de tirer sur des gens", a indiqué GGY, affirmant qu'il portait un fusil qui mesurait "entre 80 cm et 1m".

Eliézer Niyitegeka aurait également participé à une attaque perpétrée les 13 et 14 mai 1994, sur la colline de Muyira à Bisesero. Cette attaque a été déjà évoquée dans le procès de l'ancien directeur de l'usine à thé de Gisovu, Alfred Musema, condamné à l'emprisonnement à vie par le TPIR le 16 novembre 2001 pour génocide.

"Les cadavres étaient tellement nombreux qu'on aurait pu les comparer aux feuilles mortes qui tombent des arbres de cet endroit", a déclaré le témoin.

Eliézer Niyitegeka plaide non coupable. Il entend développer une défense D'alibi. Eliézer Niyitegeka est défendu par l'avocate anglaise Me Sylvia Geraghty et un confrère irlandais Me Feargal Kavanag.

A plusieurs reprises, Me Kavanag a objecté aux questions du parquet. "On ne peut pas permettre à un témoin de déposer sur des domaines qui ne sont pas contenus dans sa déclaration" antérieure aux enquêteurs, a protesté Me Kavanag.

"En matière pénale, le minimum pour l'équité, c'est que l'accusé soit informé des charges qui sont retenues contre lui. Nous n'avons pas été informés. Le procureur ne doit pas être autorisé à poser des pièges à notre client. Ce serait inéquitable. Comment le procureur peut-il introduire des
éléments dont la défense n'a pas reçu notification?", a plaidé Me Kavanag.

Me Kavanag a également mis en doute la crédibilité du témoin. L’avocat irlandais a relevé que ce n’est que récemment que le témoin GGY a mentionné son client parmi les auteurs présumés des massacres à Bisesero, alors que l’ occasion lui en avait été donnée à deux reprises. Il a en effet été interrogé par des enquêteurs du parquet. Il a également témoigné dans le procès pour génocide du pasteur Elizaphan Ntakirutimana et de son fils, le médecin Gerard Ntakirutimana.

Me Kavanag a suggéré que le témoin modelait sa déposition en fonction des accusés et qu’il était évasif dans ses réponses. « Je ne faisais que répondre aux questions qui m’étaient posées », a rétorqué le témoin. Il a ajouté : « Comme nous ne sommes pas dans le procès Ntakirutimana, je ne comprends pas l’objet de vos questions ».

Le procès Niyitegeka se déroule devant la première chambre de première instance du TPIR présidée par la juge sud-africaine Navanethem Pillay, et composée en outre des juges, norvégien Erik Mose et sénégalaise Andrésie Vaz.
AT/FH (NI-0814A )