21.09.2001 - TPIR/KAMUHANDA - QUATRE TEMOINS SUCCESSIFS DECRIVENT DIFFEREMMENT LES MEMES FAITS

Arusha 21 septembre 2001(FH)- Quatre témoins à charge entendus successivement dans le procès D'un ex-ministre accusé de génocide ont présenté différemment les faits, devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), a constaté l'agence Hirondelle. Le parquet vient de citer dix témoins dans cette affaire ouverte sur le fond le 3 septembre.

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Les quatre derniers témoins ont affirmé avoir vu l'ex-ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche scientifique et de la culture au sein du gouvernement intérimaire, Jean de Dieu Kamuhanda, à la paroisse protestante de Gikomero (préfecture de Kigali rural, centre du Rwanda), le 12 avril 1994, participant aux massacres, mais décrivent différemment les faits.

Dénommés respectivement "GAF", "GEE", "GAA" et "GEA" pour protéger leur anonymat, les témoins allèguent que l'accusé a dirigé des attaques contre des Tutsis réfugiés à cet endroit mais la façon dont il aurait conduit ces attaques varie D'un témoin à l'autre.

GAF affirme que l'accusé serait arrivé sur place dans un convoi de quatre véhicules. "Tout ce qu'il a fait, c'est de descendre du véhicule, lever les bras en l'air et prononcer le mot "Mukore" [Travaillez, euphémisme pour tuez], il est remonté dans son véhicule et parti vers D'autres endroits, et les massacres ont aussitôt commencé", selon le témoin.

GEE, de son côté, un illettré selon ses dires, indique avoir vu simplement trois véhicules.

"Kamuhanda est sorti de son véhicule et est allé parler au pasteur Nkuranga", a rapporté GEE, qui a ajouté que les massacres ont directement commencé après cet entretien. l'accusé aurait passé "environ une heure" sur les lieux, en compagnie des assaillants.

GAA, par contre, n'a vu que deux véhicules. "Kamuhanda est sorti de ce deuxième véhicule, il a levé les bras en l'air comme en guise de salutations […]. La population disait "travaillons, Kamuhanda est arrivé". Selon lui, les massacres ont duré "de quatre à cinq heures". l'accusé était présent,a-t-il indiqué.

Le dixième témoin de l'accusation, qui a commencé sa déposition jeudi, n'avait jamais entendu parler de Kamuhanda auparavant. Il a rapporté avoir appris D'"un garçon qui était là-bas" que celui qui descendait du véhicule était Kamuhanda.

Les témoins de la scène du 12 avril 1994 divergent également sur le nombre de réfugiés ainsi que sur celui des victimes.

GAF affirme qu'environ mille des trois mille Tutsis qui s'y trouvaient ont été tués sur place, alors que GEE déclare être le seul survivant D'environ quatre cents personnes qui avaient cherché refuge à Gikomero.

GAA, de son côté, estime à cinq mille le nombre total de réfugiés, dont trois mille y auraient perdu la vie. GEA, lui, est incapable D'avancer un chiffre "tellement les réfugiés étaient nombreux, et seuls les plus chanceux, dont l'heure n'avait pas encore sonné, pouvaient en sortir".

Personne parmi les quatre témoins concernés ne s'est prononcé sur l'habillement de l'accusé au moment des faits. l'avocate guinéenne, Me Aicha Condé, et son co-conseil la Britannique Me Grace Amakye, entendent présenter une défense D'alibi.

Les débats ont été subitement interrompus jeudi au début du contre-interrogatoire de GEA, suite à son état de santé. Le témoin a déclaré :" J'ai des maux de tête et cela est dû aux coups de bâton que J'ai reçus à la tête, et quand je parle pendant longtemps, je souffre".

La chambre a décidé de reporter l'affaire à lundi, espérant "que le témoin sera en forme".

Le parquet entend citer quatorze témoins dans ce procès. Les quatre témoins restants devraient déposer la semaine prochaine.

Le procès se déroule devant la première chambre de première instance du TPIR présidée par le juge tanzanien William Hussein Sekule et comprenant en outre la juge malgache Arlette Ramaroson et le juge lesothan Winston Churchill Matanzima Maqutu.

BN/AT/PHD/FH (KH_0921A)