Thaddée Kwitonda fait partie des quatre enquêteurs de la défense au TPIR dont les contrats de travail ont été résiliés ou suspendus cette semaine, parce qu'ils seraient eux-même sous investigations au Rwanda ou au parquet du Tribunal D'Arusha, selon le greffier.
Dans sa lettre, Thaddée Kwitonda explique qu'il a travaillé comme enquêteur "d’une manière régulière, continue et transparente" depuis le 21 juin 1999 et que durant cette période, il n'a jamais cherché à se cacher ou à dissimuler son identité. "J’ai été en contact permanent avec le personnel du Tribunal venant du Rwanda ou d’ailleurs. Si j’étais réellement criminel comme on le prétend aujourd’hui, J'aurais été facilement découvert pendant tous les deux ans écoulés", écrit-il.
l'enquêteur signale au passage que le gouvernement rwandais a régulièrement publié des listes de suspects de génocide et que, bien qu'il désapprouve "ces listes faites d’une manière arbitraire", "comme vous l’avez constaté, mon nom ne figure sur aucune liste. Ce n’est pas parce qu’ils ne savent pas où je suis".
Thaddée Kwitonda prend à témoin deux membres du gouvernement rwandais actuel, dont le premier ministre Bernard Makuza, son ancien condisciple de classe, qui, "sous réserve des raisons politiques et que le monde a complètement changé, tous les deux peuvent affirmer sans réserve que mon caractère ne peut en aucun cas me permettre d’être criminel".
Thaddée Kwitonda ajoute qu'au cours de ses activités d’enquêteur, plusieurs occasions se sont présentées "pour mettre au grand jour ma criminalité si elle avait eu lieu". Il cite à ce propos une investigation faite à son sujet par le département D'Etat américain avant de lui octroyer un visa pour les Etats-Unis, soulignant que "si j’avais réellement commis des crimes comme on le prétend aujourd’hui, l’enquête du département d’Etat américain aurait révélé quelque chose."
En suspendant le contrat de Thaddée Kwitonda, le greffier a indiqué qu'il est sous enquête au niveau du parquet du TPIR. l'enquêteur se dit disposé à rencontrer le bureau du procureur Carla del Ponte, pour "fournir toutes les informations souhaitées puisque je n’ai rien à cacher ou à dissimuler".
Dans l'intervalle, l'enquêteur invite le parquet à ne pas "partir des sentiments, intrigues, règlements de comptes qui ravagent la communauté des Rwandais pour coller l’étiquette de criminel sur un innocent que ses détracteurs veulent se débarrasser par tous les moyens malhonnêtes."
Thaddée Kwitonda indique que "ce n’est pas pour la première fois que je suis victime de telles mesquineries.".l'enquêteur l'écrit en ses termes :"Arrivé en Belgique en 1997, j’ai demandé l’asile politique, le dossier s’est déroulé normalement et avec ma famille, le commissariat général des réfugiés et aux apatrides nous a accordé le statut de réfugié. Le jour de nous livrer les certificats de réfugiés, nous avons été informés par surprise que le dossier était gelé pour que les services concernés fassent des investigations sur les éléments nouveaux apportés par mes compatriotes rwandais dans notre dossier. Une année après les investigations, le commissariat général aux réfugiés et aux apatrides a constaté qu’il s’agissait des intrigues fondées sur les mésententes et les règlements de compte de mes anciens collègues de service."
Les autres enquêteurs sanctionnés par le greffier sont Augustin Basebya, qui travaillait pour la défense de l'ancien maire de Mukingo (préfecture Ruhengeri, nord du Rwanda), Juvénal Kajelijeli, Augustin Karera, pour celle de l'ancien ministre de l'enseignement supérieur, Jean de Dieu Kamuhanda, et Aloys Ngendahimana, pour celle de l'ancien promoteur de la Radio-télévision libre des Milles Collines (RTLM), Ferdinand Nahimana.
Au cours D'une visite de trois jours entamée mercredi à Kigali, Adama Dieng a indiqué qu'il avait été informé qu'il y a eu "une erreur D'identité" sur Aloys Ngendahimana. Le greffier a expliqué que "son dossier est encore à l'étude, même si la décision a été prise" et qu'il profitera de sa visite au Rwanda pour approfondir ses enquêtes. Adama Dieng a ajouté que s'il s'avère qu'une erreur a été effectivement commise, elle va être corrigée, car "l'erreur est humaine".
Le ministre rwandais de la justice, Jean de Dieu Mucyo, a pour sa part déclaré, à l'issue D'une rencontre avec Adama Dieng, qu'il allait demander au parquet du TPIR de procéder aux arrestations des enquêteurs dont les contrats ont été résiliés ou suspendus. Citant le procureur près la cour suprême du Rwanda, Gérard Gahima, la radio nationale rwandaise a indiqué que le parquet dispose de dossiers judiciaires pour dix Rwandais travaillant pour le TPIR.
AT/PHD/FH (GR_0720A)