09.07.2001 - TPIR/KAJELIJELI - KIGALI EST ACCUSE DE DESTABILISER LA DEFENSE

Arusha, le 9 juillet 2001 (FH) - l'avocat de l'ancien maire de Mukingo, (préfecture de Ruhengeri, nord-ouest du Rwanda) Juvénal Kajelijeli, a accusé le gouvernement rwandais de déstabiliser la défense en traquant ses enquêteurs. "Ma préoccupation est que J'ai une équipe de défense, nous sommes au milieu du procès, et ce qu'ils [le gouvernement rwandais] font est illégal, injuste, et inéquitable, et vise à harceler, intimider et indûment influencer l'issue du procès," a déclaré à l'agence Hirondelle l'avocat américain de Juvénal Kajelijeli, Me Lennox Hinds.

3 min 15Temps de lecture approximatif

Me Hinds donnait des éclaircissements sur le problème qu'il avait soulevé lundi devant la Cour concernant son équipe et particulièrement un enquêteur rwandais en passe de se retirer, craignant le gouvernement en place à Kigali.

Dans une lettre justifiant son absence à Arusha, qui a été lue devant la chambre , l'enquêteur, Augustin Basebya, indique que "certains membres des équipes de défense subissent actuellement une sorte D'intimidation et D'incarcération à Arusha".

Ancien parlementaire rwandais actuellement en exil, Augustin Basebya figure sur la liste des suspects de génocide de première catégorie, établie par le gouvernement rwandais. "Je suis victime D'une calomnie monstrueuse et D'une injustice flagrante de la part du gouvernement rwandais, qui semble être déterminé à condamner des gens sans D'abord établir un acte D'accusation contre eux," note l'ancien parlementaire.

Augustin Basebya indique qu'il pourrait continuer à travailler pour l'équipe de Juvénal Kajelijeli, en restant sur place en Europe, en attendant qu'il soit remplacé. l'enquêteur explique que pour revenir à Arusha, il doit D'abord être blanchi.

Me Hinds affirme que l'absence de l'enquêteur Basebya va affecter la défense de son client, ajoutant que ce sont là "les visées de Kigali en traquant les membres des équipes de défense".

"J'ai porté ce problème à l'attention de la Cour" a poursuivi Me Hinds, indiquant que "les juges en ont pris note, mais ils ne peuvent rien faire D'autre que D'en prendre note. Je pense que quiconque a intérêt dans l'équité, dans la justice, tous les individus imbus D'équité devraient approcher et appeler le régime de Kigali à arrêter ces manoeuvres".

Me Hinds a pointé du doigt le représentant du gouvernement rwandais auprès du TPIR, qui serait à l'origine de ces manoeuvres.
"Selon les informations à ma possession, c'est lui [le représentant du gouvernement rwandais] qui indique le rôle que doivent jouer certaines personnes de Kigali contre les enquêteurs, et dans ce cas particulier M Basebya était un élément important dans la recherche des preuves en rapport avec l'arrestation illégale de mon client Kajelijeli, et un affidavit sur la question avait été soumis à la chambre au cours D'une audience à laquelle assistait ce Monsieur," a déclaré Me Hinds.

Réagissant à ces allégations, le représentant du gouvernement rwandais, Martin Ngoga, tout en indiquant que la question avait été "évoquée à la Cour" et qu'il serait inapproprié "D'en discuter en dehors de ce forum", a déclaré à l'agence Hirondell que: "ce n'est pas vrai que nous harcelons les enquêteurs, parce que nous connaissons leur importance dans un procès équitable. D'ailleurs, aucune preuve n'est apportée à ces allégations"

"Toutefois," a ajouté Ngoga, " il ne faudrait pas que l'on se couvre de ce privilège pour rester impuni. Ce n'est plus de la rumeur qu'il y a des suspects génocidaires parmi ces enquêteurs, puisque le Tribunal lui-même en a arrêté déjà un."

En mai dernier, Siméon Nshamihigo, ancien enquêteur de la défense du lieutenant Samuel Imanishimwe, a été arrêté et est incarcéré au centre de détention du TPIR, poursuivi pour génocide et crimes contre l'humanité.

Il y a trois mois, Martin Ngoga avait déclaré à la presse qu'il y avait parmi les enquêteurs de la défense des gens recherchés par la justice rwandaise pour génocide. "Si nous avions soulevé ce problème c'était pour répondre à nos obligations morales," a souligné Martin Ngoga, dans une interview accordée à l'agence Hirondelle.

Concernant l'établissement des listes de suspects par le gouvernement rwandais sans actes D'accusation, le représentant du gouvernement rwandais a répondu que "ces listes sont établies de façon régulière. Chaque personne qui est sur la liste a un dossier et un acte D'accusation. Et puis il n'est pas dit que tous ceux qui se trouvent sur la liste devront être condamnés. Quand quelqu'un est accusé, il peut être condamné ou acquitté. Même le TPIR a récemment acquitté un accusé." [l'ancien maire de Mabanza, préfecture de Kibuye, ouest du Rwanda, Ignace Bagilishema]

Le procès de l'ancien maire de Mukingo se déroule devant la deuxième chambre de première instance présidée par le juge tanzanien William Hussein Sekule et composée en outre des juges malgache Arlette Ramaroson, et Matanzima Maqutu du Lesotho.

Mardi, le Tribunal entendait toujours la déposition du deuxième témoin de l'accusation commencée lundi à huis clos .

BN/AT/PHD/FH (KJ_0710A)