09.05.2001 - TPIR/CYANGUGU - LA COUR REJETE UNE PARTIE DE TEMOIGNAGE BASEE SUR DES OUI-DIRE

Arusha, le 9 mai, 2001 (FH)- Le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) a rejeté mercredi une partie de témoignage basée sur des ouï-dire, lors de l'audition du 23è témoin de l'accusation dans le procès de trois personnes accusées de génocide en préfecture de Cyangugu, au sud-ouest du Rwanda. Désigné sous le pseudonyme "LC" pour protéger son anonymat, le témoin a déclaré avoir vu, le 14 avril 1994, de retour de Bukavu (ex-Zaïre), des personnes couchées dans un endroit appelé Mukadasomwa, mais qu'il ne pouvait pas savoir ce qui s'était passé.

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"Je ne sais pas ce qui s'était passé, c'est mon collègue Shabani qui m'a appris que ces personnes venaient D'être été tuées; il m'a dit de venir voir le préfet pour lui demander ce qu'il devait faire," a déclaré le témoin, suscitant de vives protestations de la défense.

"Nous ne pouvons pas contre-interroger le témoin sur base D'ouï-dire, sur des témoignages racontés par une tierce personne, dont nous ne connaissons pas les allées et venues," a lancé Me Luc Boutin, co-conseil canadien dans le procès qui regroupe trois anciens dignitaires de Cyangugu.

"Cet élément de preuve est inadmissible et ne peut être autorisé," a relevé le juge Lloyd George Williams de St Kitts et Nevis, qui préside les débats. La chambre, qui venait de s'enquérir auprès du parquet, a estimé que ces faits n'avaient pas été mentionnés dans l'acte D'accusation.

Sont concernés par ce procès l'ancien ministre des transports sous le gouvernement intérimaire André Ntagerura, l'ancien préfet de Cyangugu Emmanuel Bagambiki, ainsi que l'ancien commandant de la garnison militaire de Cyangugu, le lieutenant Samuel Imanishimwe.

Le témoin a poursuivi en disant qu'après avoir appris la mort de ces personnes, le préfet (Bagambiki) a ordonné à Shabani et un médecin D'aller chercher des prisonniers pour les enterrer. "Nous les avons enterrées près de la route où elles avaient été tuées [à Kadasomwa]," a poursuivi le témoin.

M. LC avait auparavant rapporté que le préfet avait convoqué une réunion du conseil de sécurité le 8 avril 1994, et exigé que tous les chauffeurs des services publics soient présents à la préfecture. "Il y avait une réunion extraordinaire des agents des services publics, puisque c'était en temps de guerre; nous [les chauffeurs] sommes restés dehors, le préfet nous a dit ce que nous devons faire et avec qui nous devons travailler," a précisé le témoin, ajoutant qu'il devait travailler avec les gendarmes à la gendarmerie, et que son collègue Shabani et un médecin devaient faire le tour pour ramasser les cadavres, les enterrer ou les conduire dans leurs familles.

Le témoin a en outre indiqué que le commandant Imanishimwe a conduit trois personnes au camp militaire (de Cyangugu), puis qu'"il les a ensuite conduites au barrage de Gatandara où elles ont été tuées; il nous a amené les cadavres des victimes que nous avons enterrés le jour suivant", a-t-il ajouté.

La déposition a continué mercredi après-midi avec le contre-interrogatoire du témoin LC. Elle doit reprendre jeudi.

Les coaccusés de Cyangugu sont jugés par la troisième chambre de première instance du TPIR, comprenant les juges Williams, le slovène Pavel Dolenc, et le russe Yakov Ostrovsky.

GA/PHD/FH (CY_0509A)