20.03.2001 - TPIR/MEDIAS - UN TEMOIN DU PARQUET ACCUSE UN AVOCAT DE l'AVOIR INTIMIDE

Arusha 20 mars 2001 (FH) - Un témoin rwandais cité par le parquet dans le procès des médias a accusé un avocat de la défense de l'avoir intimidé lors D'un contre-interrogatoire mardi devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). Désigné par les lettres "AAY" pour protéger son anonymat, le douzième témoin de l'accusation, a affirmé qu'il avait été intimidé par l'avocat américain, Me John Floyd, conseil principal dans l'affaire de l'ancien directeur et rédacteur en chef de la revue Kangura, Hassan Ngeze, un des coaccusés dans ce procès.

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"Je voudrais vous demander de rappeler aux avocats de la défense qu'ils ne devraient pas nous intimider", a déclaré le témoin à la présidente de la chambre, la juge sud-africaine Navanethem Pillay, qui le remerciait à la fin de sa déposition.

Interrogé par la présidente s'il s'était senti intimidé, le témoin a répondu: "Vous voyez le ton avec
lequel cet avocat me parle, si J'étais quelqu'un qui n'était pas habitué à vivre en société, J'aurais eu
peur".

l'avocat américain lui avait auparavant posé des questions tendant à mettre en doute sa crédibilité,
allant jusqu'à lui faire reconnaître qu'il avait été condamné pour contrefaçon. Me Floyd a plus tard avancé que le témoin ne disait pas la vérité mais qu'il était par contre motivé par un désir de vengeance contre Hassan Ngeze qui l'avait calomnié dans un article paru dans Kangura.

Le témoin s'était à un moment donné plaint "s'agissant des paroles que l'avocat de la défense m'adresse sur un ton que je qualifierais D'agressif" " Je crois que cela confirme ce que J'ai entendu sur Radio Rwanda et la BBC comme quoi les témoins qui viennent sont traités par les avocats de la défense comme ils le veulent", a poursuivi M. AAY Le ministre rwandais de la justice avait, dans une interview accordée à Radio Rwanda, dénoncé "le harcèlement" des témoins rwandais du parquet par les avocats de la défense, amenant Me Floyd à déposer une requête devant la cour.

"S'ils continuent comme ça ils risquent de nous intimider. De façon que les gens n'accepteront plus de venir témoigner. Mais je crois que cela dépend de l'éducation de chacun", a conclu le témoin qui s'exprimait en sa langue maternelle, le kinyarwanda.

La juge Pillay a indiqué: " Nous avons observé cela; c'est comme ca qu'il parle même chez lui. Que ferions nous D'autre", suscitant une réponse amusée du témoin et qui a fait rire le public: "rien à faire".

Les débats ont été souvent houleux dans ce procès entre les témoins du parquet et les avocats de la défense, allant même jusqu'à certains témoins refusent momentanément de répondre.
Les témoins du parquet sont souvent réfractaires aux questions en rapport avec le système politique en vigueur au Rwanda, notamment l'emprise présumée du Front patriotique rwandais (FPR) sur l'ensemble des institutions étatiques et les crimes de guerre attribués à l'armée rwandaise actuelle . Les témoins estiment le plus souvent qu'ils ne sont pas venus répondre à des questions à caractère politique.

Le procès se poursuit dans l'après-midi avec la comparution D'un nouveau témoin du parquet. Peu avant son audition, la chambre devra cependant tenir une séance à huis clos consacrée aux questions soulevées depuis quelques temps par la défense de Hassan Ngeze.

Hassan Ngeze, rappelle-t-on, dénonce la fouille effectuée dans sa cellule le 10 janvier dernier suite
aux informations faisant état du fait qu'il avait ouvert un site internet qu'il alimenterait à partir du
centre de détention. l'accusé réclame en outre la traduction intégrale de la revue Kangura dans les langues officielles du Tribunal ainsi que la réhabilitation des membres de son équipe de défense qui ont été licenciés.

Hassan Ngeze est coaccusé avec l'ancien promoteur de la Radio-télévision libre des mille collines (RTLM), Ferdinand Nahimana et l'ancien conseiller au ministère des affaires étrangères et membre du comité D'initiative de la RTLM, Jean-Bosco Barayagwiza. Jean-Bosco Barayagwiza a décidé de boycotter ce procès dans son intégralité.

AT/MBR/FH (ME_0320A )