07.02.2001 - TPIR/MEDIAS - LA DEFENSE DE HASSAN NGEZE DEMANDE l'INVALIDATION DE LA DEPOSITION D'UN T

Arusha 7 février 2001 - La défense de l'ancien directeur et rédacteur-en-chef de la revue Kangura, Hassan Ngeze, a demandé l'invalidation de la déposition D'un témoin à charge entendu lundi et mardi par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). Au cours du contre-interrogatoire, l'avocat principal de Hassan Ngeze, l'Américain Me John Floyd, a contesté la crédibilité du quatrième témoin de l'accusation dans le procès des anciens responsables des médias qui a repris au début de la semaine à Arusha, après les vacances judiciaires de fin D'année.

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Sont concernés par le procès des médias outre Hassan Ngeze, l'ancien directeur de la Radio-télévision libre des milles collines (RTLM), Ferdinand Nahimana, et l'ancien conseiller politique au ministère des affaires étrangères et membre du comité D'initiative de cette radio, Jean-Bosco Barayagwiza.

Désigné par les lettres "WD" pour protéger son anonymat, le témoin avait notamment accusé Ferdinand Nahimana et Jean-Bosco Barayagwiza D'avoir comploté contre des Tutsi en septembre 1993. Garçon de restaurant et barman successivement à l'hôtel des milles collines et à l'hôtel des diplomates de Kigali, ce Tutsi de 35 ans, membre de l'association rwandaise des rescapés du génocide "Ibuka" (Souviens-toi), et adepte du Front patriotique rwandais (FPR, ex-rébellion tutsie,
actuellement au pouvoir au Rwanda), aurait surpris les deux anciens notables en train de prôner l'extermination des Tutsis, au cours D'une conversation "à voix normale", à côté de la piscine de l'hôtel des milles collines.

Ferdinand Nahimana et Jean-Bosco Barayagwiza auraient également participé à des réunions, à l'hôtel des diplomates, où des massacres de Tutsis étaient évoqués, dans les jours qui ont suivi l'attentat qui a coûté la vie à l'ancien président rwandais, Juvénal Habyarimana, le 6 avril 1994. Me Floyd a estimé que la déposition de M. WD était incohérente et il a demandé son annulation pure et simple. Les juges qui ne l'avaient au départ pas pris au "sérieux", ont promis qu'ils allaient examiner sa requête.

l'association Ibuka, dont le témoin est membre, est souvent soupçonnée de "délation" dans les milieux des accusés du TPIR. Peu avant la requête orale de Me Floyd, la défense de Ferdinand Nahimana avait suggéré au témoin D'admettre que l'ancien directeur de la RTLM ne s'était jamais rendu à l'hôtel des diplomates entre le 6 et le 12 avril 1994. Ferdinand Nahimana pourrait présenter un alibi pour cette période.

Les avocats avaient également laissé entendre que la conversation alléguée de septembre 1993 était inventée. Le témoin avait affirmé qu'à l'époque, "Nahimana a dit à Barayagwiza que si on tuait les Tutsis, les organisations internationales feraient du bruit mais qu'au bout D'un certain temps cela cesserait comme ce fut le cas au Bugesera [mars 1992] et à Kibuye". Jean-Bosco Barayagwiza lui aurait rétorqué que "le Rwanda appartient aux Hutus majoritaires. Le Rwanda n'appartient pas à la minorité tutsie", selon le témoin.

Ferdinand Nahimana est défendu par l'avocat français, Me Jean-Marie Biju Duval, et une consoeur anglaise, Me Diana Ellis. Les avocats se sont montrés étonnés par le fait qu'un garçon de restaurant qui devait normalement s'occuper de plusieurs clients, se soit intéressé uniquement à deux personnes. Me Floyd lui a demandé s'il était alors espion ou s'il était en quête de pourboire.

Le procès des médias se déroule en l'absence de Jean-Bosco Barayagwiza qui le boycotte depuis son ouverture sur le fond le 23 octobre 2000. Mardi, le Tribunal a autorisé ses avocats à se retirer de l'affaire. Le greffier a été instruit de lui commettre "immédiatement" un autre défenseur. Jean-Bosco Barayagwiza était représenté par l'avocate canadienne, Me Carmelle Marchessault, et l'Américain, Me David Danielson.

Hassan Ngeze boycotte également ce procès depuis lundi dernier, protestant contre une fouille effectuée dans sa cellule le 10 janvier 2001. Il réclame également la traduction intégrale, en français et en anglais, de 71 numéros de Kangura sur lesquels le procureur fonde son acte D'accusation.

Mercredi matin, le Tribunal a entamé l'audition du cinquième témoin de l'accusation.

AT/MBR/FH (ME_0207A)