14.11.2000 - TPIR/SEMANZA - LA DEFENSE ACCUSEE DE DEFORMER LES PROPOS D'UN TEMOIN A CHARGE

Arusha 14 novembre 2000 (FH) - Les juges ont fréquemment mis en garde la défense de l'ancien maire de Bicumbi (préfecture de Kigali rurale, centre-est du Rwanda), Laurent Semanza, lors du contre-interrogatoire du quatrième témoin de l'accusation, mardi ,devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). A plusieurs reprises, il a été reproché à l'avocat béninois, Me Sadikou Alao, co-conseil dans l'affaire Semanza, de déformer les déclarations du témoin "VN", un survivant des massacres de Bicumbi pour lesquels l'ancien maire est notamment poursuivi.

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"Tout le temps, vous vous référez à ce qu'a dit auparavant le témoin [durant l'interrogatoire principal] et chaque fois vous déformez ses propos", a déclaré le président de la chambre, le juge russe Yakov Ostrovsky, apparemment fâché.

l'ancien maire de Bicumbi répond de quatorze chefs D'accusation de génocide et de crimes contre l'humanité. Les crimes allégués ont été commis dans les communes de Gikoro et Bicumbi.

En 1994, Laurent Semanza était député, désigné par l'ex-parti présidentiel pour le futur parlement de transition. Le parquet allègue qu'il était influent dans sa région.

A un moment donné, la défense de Semanza a été prise à partie par l'accusation et les juges pour avoir prêté au témoin VN une déclaration selon laquelle il aurait été un espion.

"Le témoin n'a rien dit qui ressemble à cela", a protesté le substitut du procureur, le Canadien D'origine nigériane, Chile Eboe Osuji.

"Nous avons des difficultés à comprendre cela", a pour sa part indiqué le juge jamaïcain, George Wiliams. "Où allons-nous avec ce genre de questionnement?", a poursuivi le juge.

Me Sadikou Alao a plaidé que Laurent Semanza était un citoyen ordinaire, sans influence particulière dans la communauté. l'avocat béninois a soutenu que le fait que son client était un homme riche ne signifie pas qu'il avait le pouvoir D'inciter des gens à commettre le génocide.

Au cours du contre-interrogatoire de VN, Me Alao a notamment cherché à savoir comment le témoin a pu obtenir le programme des réunions qu'aurait tenu l'accusé avec ses subalternes en vue D'organiser des massacres, selon le témoin.

Le défenseur a également contesté les affirmations selon lesquelles l'ancien maire ne délivrait pas de documents de voyage aux ressortissants de la partie orientale de sa commune.

Le président de la chambre a estimé que de tels détails ne pouvaient pas amener à prouver la culpabilité ou l'innocence de l'accusé.

Me Alao a par ailleurs insisté pour que le témoin donne des éclaircissements sur un document manuscrit qu'il avait remis au bureau du procureur et contenant, selon VN, un plan de distribution D'armes concocté par Semanza.

Le juge Ostrovsky a indiqué que ce document ne devait pas être exploité "car il n'a pas été versé au dossier comme une pièce à conviction". Il a été toutefois décidé que ce document soit examiné à huis clos et que s'il était accepté comme pièce à conviction de la défense, il soit traduit dans les langues officielles du Tribunal.

Laurent Semanza, 56 ans, a été arrêté au Cameroun le 27 mars 1996 et transféré au centre de détention des Nations unies à Arusha le 19 novembre 1997. Il plaide non coupable.

l'ancien maire de Bicumbi comparaît devant la troisième chambre de première du TPIR comprenant outre les juges Ostrovsky et Williams, le juge slovène, Pavel Dolenc.

GG/GA/JC/AT/PHD/FH (SE%1114A)