02.11.2000 - TPIR/MEDIAS - LE JOURNAL KANGURA ETAIT LA VOIX DES HUTUS, SELON UN TEMOIN

Arusha 2 novembre 2000 (FH) - Le journal Kangura était la voix des Hutus, a affirmé un témoin jeudi devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), à Arusha. Ancien journaliste à Radio Rwanda, reporter sportif, le deuxième témoin à charge a été, selon ses dires, un "proche collaborateur" de l'ancien directeur et rédacteur en chef de Kangura, Hassan Ngeze.

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Désigné par les lettres "AHA" pour protéger son anonymat, le témoin, emprisonné au Rwanda depuis sept ans, a indiqué que le journal Kangura abordait les sujets en rapport avec la politique, le multipartisme, la guerre et les conflits entre des personnes ou des sociétés.

Le journal désignait également des "collaborateurs de l'ennemi" et "demandait au pouvoir de les arrêter", a dit AHA. "Parfois c'était vrai, parfois c'était faux", selon AHA.

Le témoin a expliqué que le but du journal Kangura était "D'attirer l'attention des Hutus, surtout des dirigeants, afin D'être responsables". "Le combat de Ngeze était celui D'éveiller la masse hutue contre le danger tutsi", a-t-il poursuivi.

Le témoin a indiqué que Hassan Ngeze a été plusieurs fois arrêté, voire condamné et son journal suspendu pour "atteinte à la sûreté de l'Etat". Il avait notamment prévenu les autorités de l'attaque du Front patriotique rwandais (FPR) qui était en préparation depuis le territoire ougandais.

Hassan Ngeze a été libéré quand "heureusement ou malheureusement pour lui, je ne sais pas", la suite des événements lui a donné raison, selon AHA.

Le témoin a affirmé qu'outre la version en kinyarwanda, la langue nationale rwandaise, Kangura avait une édition internationale dont le but était de "s'adresser aux Hutus burundais".

Kangura était financé essentiellement par les ventes, a dit le témoin, précisant que le journal aurait bénéficié du soutien du directeur des services étatiques de renseignements, D'un directeur D'une banque privée, "de certains Hutus dont J'ignore l'identité" et de certains lecteurs.

M. AHA a indiqué qu'entre avril et juillet 1994, Kangura a cessé de paraître. "Je crois que Ngeze avait changé de boulot. Il n'était plus journaliste. Il était devenu commandant de peloton ou de section", selon AHA, soutenant qu'il s'était joint aux miliciens qui tuaient les Tutsis. Le journal Kangura aurait recommencé à paraître quand Hassan Ngeze était en exil.

Le témoin a rapporté qu'il n'y avait de "rapports directs" entre la Radio-télévision libre des mille collines (RTLM) et le journal Kangura, à part que les journalistes des deux médias se connaissaient.

"Peut-être que Ngeze pouvait intervenir sur la RTLM, commenter sur ses visions qui devenaient réalité. Mais même Tito Rutaremara du FPR intervenait", a-t-il poursuivi.

Hassan Ngeze est coaccusé avec l'ancien directeur de la RTLM, Ferdinand Nahimana, et l'ancien conseiller politique au ministère des affaires étrangères et membre du comité D'initiative de la RTLM, Jean-Bosco Barayagwiza.

Le témoin était journaliste à l'Office rwandais D'information (ORINFOR) quand Ferdinand Nahimana en était directeur, avant D'être nommé à la RTLM. Il a en outre indiqué s'être rendu plusieurs fois au domicile et au bureau de Barayagwiza, en compagnie de Ngeze mais a-t-il précisé Barayagwiza ne le connaissait pas parce que "je n'étais pas un grand homme". La déposition du témoin AHA se poursuivra lundi.
AT/DO/FH (ME%1102A )