"Il y a violation du règlement, et particulièrement lorsqu'il s'agit D'un accusé vulnérable comme l'était mon client. Il n'était pas juriste, il n'a été que journaliste et politicien", a dit Me Geraghty. Quand l'acte D'accusation a été confirmé, a poursuivi l'avocate, "M.Othman (le chef des poursuites auTPIR) a essayé D'obliger mon client à admettre sa culpabilité sur toutes les charges, et, en fait, de donner des preuves qu'on pourrait utiliser contre lui-même, en violation du statut du tribunal". "M.Othman a essayé D'exiger de mon client de témoigner contre les autres accusés, notamment ceux qui composent le groupe avec lequel le procureur voudrait obtenir une jonction D'instances ", a-t-elle ajouté.
Selon Me Geraghty, Niyitegeka aurait reçu la promesse que s'il plaidait coupable, sa peine serait allégée car certains chefs D'accusation seraient abandonnés, notamment ceux relatifs à sa participation dans les massacres de Bisesero. Aussi, Sa femme et ses enfants seraient envoyés dans un pays francophone où ils seraient en sécurité et seraient assistés financièrement avant l'intervention du Haut commissariat aux réfugiés.
Me Geragthy a aussi laissé entendre que le représentant du parquet avait reconnu que son client n'avait jamais été contre les tutsis et que les crimes commis à Bisesero lui étaient allégués par erreur. "Niyitegeka était marié à une femme tutsie et il a eu à employer des tutsis par le passé", a relevé l'avocate. Au cas où Niyitegeka refuserait de coopérer, le procureur aurait menacé notamment D'insérer le crime de viol dans l'acte D'accusation par lui établi, selon Me Geraghty.
Pour ma part a dit l'avocate aux juges, "que le procureur menace mon client est oppressant et est un abus grossier" "Cela a causé préjudice à mon client et est de nature à le priver du droit à un
procès juste", a-t-elle ajouté.
l'avocate de Niyitegeka a par ailleurs soutenu que le procureur n'avait pas réussi à produire des éléments de preuve permettant D'accuser son client et que, par voie de conséquence, la chambre devrait surseoir aux poursuites et se déclarer incompétente en la matière.
Le représentant du parquet, l'australien Ken Fleming a pour sa part fait valoir que la chambre était compétente pour juger Niyitegeka, et que l'avocate avait tort D'affirmer qu'il n'y avait pas de base pour former un acte D'accusation contre son client. Il a évoqué notamment une déposition D'un témoin qui avait dit que "J'ai vu Niyitegeka une fois, je ne l'ai pas vu tuer lui-même ou tirer lui-même, mais je l'ai entendu dire que nous avons suffisamment D'engrais pour notre sol" (faisant allusion aux cadavres des tutsis).
Ken Fleming a en outre plaidé que M.Othman n'avait rien promis à l'accusé, mais que par contre, ce dernier avait essayé de marchander avec le bureau du procureur pour éliminer certaines charges et obtenir des faveurs.
La deuxième chambre de première instance du TPIR présidée par le juge sénégalais Laïty Kama a rejeté la requête aux fins de surseoir aux poursuites contre Niyitegeka, en attendant une décision dans une autre requête portant sur une exception D'incompétence également plaidée par la défense.
Eliézer Niyitegeka est accusé de génocide, entente en vue de commettre le génocide, crimes contre l’humanité, et crimes de guerre. Il a été arrêté le 9 février 1999 à Nairobi, puis transféré deux jours plus tard à Arusha. Lors de sa comparution initiale le 5 juin, Niyitegeka a plaidé non coupable des six chefs d’accusation à sa charge. Selon l’acte d’accusation établi par le parquet, Niyitegeka aurait_commis des crimes à Bisesero en préfecture de Kibuye (ouest du Rwanda), où des milliers d’hommes, femmes et enfants, essentiellement des tutsis, avaient trouvé refuge en fuyant les attaques qui avaient envahi toute la préfecture, du 9 avril au 30 juin 1994.
A différents endroits et à différentes occasions, entre avril, mai et juin 1994, et souvent de concert avec d’autres personnes, Niyitegeka a conduit à Bisesero des individus armés, et leur a ordonné d’attaquer des personnes qui y avaient trouvé refuge[...] Il a personnellement attaqué et massacré des personnes qui y avaient trouvé refuge, indique l’acte d’accusation.
CR/MBR/FH (NA%0602A)