Ainsi, l'ancienne chambre de première instance du tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), présidée par le juge suédois Lennart Aspegren, et comprenant en outre les juges sénégalais Laïty Kama et sud-africaine Navanethem Pillay, n'aura retenu que trois des neuf chefs D'accusation pesant sur Musema.
Alfred Musema, 51 ans, est condamné pour avoir " participé aux attaques menées contre les Tutsis réfugiés sur les collines de Gitwa, Rwirambo, Muyira, et Mpura " en préfecture de Kibuye dans l'ouest du Rwanda, entre fin-avril et début mai en 1994. Musema a par ailleurs " ordonné le massacre de près de quatre cent Tutsis qui avaient trouvé refuge dans la grotte de Nyakavumu ", dans les collines de Bisesero, toujours dans Kibuye.
Enfin, Musema a "violé une femme du nom de Nyiramasugi et a par la suite encouragé les autres à faire de même ", et cela s'est passé dans la région de Bisesero, toujours en préfecture de Kibuye.
" La chambre a conclu que Musema portait une responsabilité individuelle indéniable dans le génocide pour avoir, par ses ordres, sa présence et sa participation directe, aidé et encouragé le meurtre de membres du groupe ethnique tutsi ", a dit le juge Aspegren qui lisait le verdict. " Il porte la responsabilité des actes commis par les employés de l'usine à thé qui étaient sous son autorité ", a ajouté le juge. Bien que les juges Aspegren et Pillay ont émis chacun en ce qui le concerne des opinions séparées sur certains faits et fondements juridiques, ils ont souscrits au verdict et à la sentence rendus par la chambre.
" Les crimes commis sont D'une extrême gravité ", a dit le juge. " Musema n'a pris aucune mesure pour empêcher les criminels D'utiliser les véhicules de l'usine qu'il dirigeait, de même qu'il n'a pas découragé les personnes sous son contrôle à commettre des crimes " a poursuivi le juge. "Il a délibérément commis des crimes et n'en a jamais exprimé le moindre remords ", a ajouté le juge avant de conclure que " les circonstances aggravantes l'emportaient sur les circonstances atténuantes ".
La défense D'alibi avancée par l'avocat britannique de Musema, Me Steven Kay a porté tout de même ses fruits. Le TPIR n'a pas pu établir " au delà de tout doute raisonnable ", la présence de Musema sur au moins cinq lieux où se sont commis des crimes lui allégués par l'accusation. Par ailleurs, le parquet n'a pas pu "démontrer l'existence D'un lien de connexité entre les actes qui engagent la responsabilité pénale individuelle de Musema, et le conflit armé à caractère interne qui déchirait le Rwanda en 1994 ". Ainsi Musema a été déclaré non-coupable de violations des conventions de Genève applicables en temps de guerre et de leur deuxième protocole additionnel.
l'avocat de Musema a D'ores et déjà annoncé son intention de faire appel. " Nous avons avancé des arguments qui auraient dû conduire à l'acquittement de Musema sur toutes les charges, mais à la lumière du fait qu'il n'a pas été acquitté, nous allons interjeter appel ", a dit Me Kay à l'agence de presse Hirondelle.
Au cours du procès, Me Kay a présenté aux juges des documents divers, tels que ordres de mission, factures et lettres, pour prouver que son client n'était pas en préfecture de Kibuye au moment où se commettaient les crimes allégués.
Musema a été arrêté en Suisse le 11 février 1995. Son affaire a été D'abord traitée par la justice militaire suisse, jusqu'au moment où le TPIR a demandé son transfert à Arusha. Son procès, qui a débuté en janvier et pris fin en juin 1999, aura été le plus rapide de tous ceux menés par le TPIR jusqu'à ce jour. Le jugement de Musema est le septième rendu par le tribunal D'Arusha depuis sa création en 1994, après le génocide rwandais.
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